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Pouvez vous résumer la polémique entre Stéphane Nivet, dircom de la Licra, et un militant insoumis ?

La Licra a accusé un militant insoumis d'avoir fait un jeu de mot sur la Shoah. L'intéressé a répondu en accusant à son tour le directeur de communication de l'association antiraciste d'avoir assimilé «arabes et terroristes» dans un message posté sur Twitter en décembre 2018.
Capture d'écran Twitter
publié le 14 mars 2019 à 11h52

Question posée sur Twitter le 12/03/2019

Bonjour,

Vous faites allusion à une polémique opposant la Licra – et notamment son directeur de communication Stéphane Nivet – à Taha Bouhafs, militant de la France Insoumise, candidat aux élections législatives de 2017, et auteur de la vidéo d'Alexandre Benalla s'en prenant à des manifestants, le 1er mai 2018 à Paris.

Tout part de l'agression dont a été victime Alain Finkielkraut par des gilets jaunes, qui a généré une polémique, des commentateurs la qualifiant d'antisémite, quand d'autres parlaient d'antisionisme. Benoît Hamon prend position dans un tweet : «Je combats les idées réactionnaires et radicales d'Alain Finkielkraut. Mais je condamne sans aucune réserve ceux qui l'ont conspué, insulté et traité d'un "sale sioniste" qui voulait dire "sale juif"». En réaction à ce tweet, Taha Bouhafs écrit : «Sale sioniste veut dire sale juif ? Sacré Benoit, c'est bientôt le dîner du CRIF, et t'as pas envie d'être privé de petits fours, je comprends

Le tweet du militant insoumis suscite quelques commentaires peu amènes de membres du Printemps républicain. Le 19 février Laurent Bouvet, cofondateur de cette association laïciste, évoque ainsi la Gerbe, journal antisémite des années 40.

La Licra accuse le militant insoumis de reprendre les jeux de mots antisémites de Jean-Marie Le Pen

Dix-huit jours plus tard, le 8 mars, la Licra réagit et va plus loin, accusant Taha Bouhafs d'un jeu de mots sur les fours crématoires : «Il y a des "jeux de mots" nauséeux sur les "petits fours" qu'on avait l'habitude d'entendre dans la bouche de J-M Le Pen. Aujourd'hui, les voilà dans la bouche d'un militant de la France Insoumise et candidat de cette formation politique aux dernières élections législatives

Dans son tweet, la Licra établit un parallèle avec l'ex-leader du FN, Jean-Marie Le Pen, condamné par la justice pour avoir renommé, en 1988, le ministre Michel Durafour, «Durafour-crématoire».

Dans la foulée, Taha Bouhafs dément tout jeu de mots : «RI-DI-CU-LE, Ce qui me donne la nausée moi, c'est l'instrumentalisation de la Shoah au service d'un agenda politique. On avait l'habitude de votre mauvaise foi, mais là vous êtes carrément dans la manipulation et le mensonge.»

Les vives réactions sur les réseaux sociaux dus à la gravité de l'accusation et de la comparaison entraînent un léger rétropédalage de la Licra, qui, dans un message posté le lendemain, a maintenu que le tweet de Taha Bouhafs était «odieux», mais en étant moins affirmative sur le supposé «jeu de mots».

«Un certain Jawad habitant à Saint-Denis»

Suite aux accusations de la Licra, Taha Bouhafs a dénoncé la «dérive» de l'association, et ciblé nommément son directeur de la communication, Stéphane Nivet, que le militant insoumis suspecte d'être en charge du compte Twitter de la Licra (ce que nous n'avons pas pu vérifier pour l'heure), et qui s'en était déjà pris à Bouhafs en décembre 2018.

Alors que le militant avait posté un message sur Twitter, indiquant qu'il était à la recherche d'un appartement, Nivet -par ailleurs membre du Printemps Républicain, dont il est le référent lyonnais- avait commenté le tweet ainsi, depuis son compte personnel : «Un certain Jawad habitant à Saint-Denis a une solution à vous proposer.» Allusion au célèbre logeur des terroristes du Bataclan.

Pour Bouhafs, le directeur de communication de la Licra assimilait ainsi «les arabes aux terroristes». «C'est censé être une association antiraciste. Je suis scandalisé, Des sanctions doivent être prises», ajoute-t-il.

Sur Twitter toujours, plusieurs internautes ont défendu le tweet de Nivet, assurant que c'était, en réalité, une blague récurrente sur le réseau, visant à proposer à ceux qui cherchent un logement les services de Jawad Bendaoud, qui a logé «sans le savoir» deux des terroristes du 13 novembre 2015. De fait, comme visibles ci-dessous, on retrouve des occurrences de cette blague sur Twitter.

La Licra ne fait aucun commentaire

Contacté par CheckNews, Stéphane Nivet le directeur de communication de la Licra, qui a depuis supprimé son compte Twitter, nous a répondu par mail, dénonçant un «procédé totalitaire qui consiste à utiliser mes tweets personnels aux fins de me nuire au plan professionnel».

Relancé pour savoir ce qui l’avait poussé à poster son message en référence à Jawad Bendaoud, le communicant n’a pas souhaité s’expliquer.

La polémique a eu un gros retentissement sur Twitter, propulsant le mot-clé «Licra» dans le top des sujets les plus discutés du moment sur le réseau. En interne, une source de l’association antiraciste concède que le sujet a provoqué des remous en interne, et que la Licra a été saisie par de nombreuses personnes sur le sujet.

Contactée par CheckNews, la Licra ne souhaite faire aucune déclaration sur ce sujet. Ni sur le tweet du compte de l’association dénonçant le supposé jeu de mots de Taha Bouhafs sur les «petits fours», ni sur la polémique qui a suivi concernant son directeur de communication.

Egalement contactés par CheckNews, Taha Bouhafs et son avocat, Maître Arié Alimi, ont déclaré envisager de porter plainte contre l’association.

Cordialement