Question posée par Martin le 23/04/2019
Bonjour,
Voici votre question, que nous avons raccourcie : «Que signifient "les adorateurs de Pâques" (easter worshippers) terme utilisé par la gauche américaine ?» Vous faites référence à une levée de boucliers de l'extrême droite américaine, à la suite des attentats qui ont fait plus de 320 morts au Sri Lanka dans des hôtels et des églises le dimanche de Pâques, et qu'a récemment revendiqués l'Etat islamique.
L'alt-right états-unienne s'indigne que plusieurs dignitaires démocrates n'emploient pas les termes «chrétiens» ou «catholiques» pour désigner les victimes mais préfèrent évoquer des attaques ou des attentats commis, entre autres, contre les «Easter worshippers». C'est-à-dire les personnes qui «adorent» Pâques, qui «prient» pour Pâques, ou encore «les fidèles de Pâques», selon les traductions. Dans le collimateur des droitistes, les tweets de l'ex-président Barack Obama, de la candidate déçue à la fonction suprême Hillary Clinton, mais aussi des représentants à la chambre de l'Arizona de la Californie, du Michigan, du maire de San Antonio (Texas) et candidat à la présidentielle, Julian Castro, etc.
The attacks on tourists and Easter worshippers in Sri Lanka are an attack on humanity. On a day devoted to love, redemption, and renewal, we pray for the victims and stand with the people of Sri Lanka.
— Barack Obama (@BarackObama) April 21, 2019
On this holy weekend for many faiths, we must stand united against hatred and violence. I'm praying for everyone affected by today's horrific attacks on Easter worshippers and travelers in Sri Lanka.
— Hillary Clinton (@HillaryClinton) April 21, 2019
Parmi toutes les personnalités citées ci-dessus, Obama est le premier à tweeter. Son message commence ainsi : «Les attaques contre des touristes et ceux qui priaient pour Pâques au Sri Lanka sont une attaque contre l'humanité […]». Plusieurs démocrates (comme Clinton) lui ont emboîté le pas, rendant hommage à deux «catégories» de victimes : celles qui priaient pour Pâques d'une part, et les touristes d'autre part.
Les contempteurs des messages de solidarité des démocrates notent qu'Obama comme Clinton ont en revanche utilisé le mot «musulmans» pour désigner les victimes de l'attentat de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, le 15 mars. L'auteur de cette tuerie a fait au moins 50 morts et autant de blessés, en attaquant deux mosquées. Mais le terroriste d'extrême droite n'avait ciblé que ces lieux de culte, alors que les attaques survenues au Sri Lanka lors du week-end pascal visaient à la fois des cérémonies religieuses chrétiennes et des hôtels.
La chaîne conservatrice Fox News s'est notamment engouffrée dans la brèche, tapant vertement sur les démocrates ayant utilisé cette expression, comme le montre ce montage du HuffPost.
Pourtant, de la même manière, le président Donald Trump a lui tweeté qu'il s'agissait d'une attaque terroriste «contre des églises et des hôtels», tout en présentant ses condoléances «au grand peuple du Sri Lanka». Sans que ce message ne fasse polémique.
«Elles priaient et c’était Pâques»
Selon l'interprétation d'un internaute sur le réseau social Reddit (en anglais), les démocrates «essayent de trouver une formule ne laissant pas penser que les touristes [tués] n'étaient pas chrétiens, ou que seulement des chrétiens ont été tués». Parler de chrétiens et de touristes aurait pu sous-entendre qu'aucun touriste n'était chrétien, explique-t-il, et parler uniquement de chrétiens aurait omis le fait que certaines touristes ne l'étaient pas.
«Il faut vraiment être de mauvaise foi pour voir dans cette référence aux « fidèles de Pâques » une tentative de nier la chrétienté» des victimes, écrit dans une tribune à Slate l’autrice chrétienne Ruth Graham, pour qui il n’est donc pas anormal d’employer «Easter worshippers» : «Le terme est plus descriptif que « chrétiens », parce qu’il permet de préciser le fait que les victimes célébraient activement Pâques quand elles ont été tuées. Elles priaient, et c’était Pâques.» Graham remarque aussi qu’à la veille de l’attentat, l’agence Associated Press titrait ainsi une dépêche sur un autre sujet : «Des touristes et des fidèles de Pâques déplorent la fermeture de Notre-Dame» (en anglais). Sans que cela ne déclenche de polémique.