Question posée par Théodore le 09/05/2019
Bonjour,
Difficile pour le monde du cinéma, et pour Cannes qui a accueilli à de nombreuses reprises le producteur Harvey Weinstein de surcroît, d'échapper aux réflexions sur la place des femmes dans la société suite au mouvement #MeToo. L’année dernière, les 82 femmes avaient monté les marches ensemble pour protester contre les injustices dans cette industrie. Leur chiffre n'avait pas été choisi au hasard : il représentait le nombre de réalisatrices sélectionnées en compétition à Cannes depuis 1946 contre... 1 688 hommes.
C'est l'association 50/50, créée suite au mouvement #MeToo, et qui milite depuis pour l'égalité et la diversité dans le cinéma français, qui a eu l'idée de les réunir. D'autant que le problème n'existe pas qu'à Cannes : dans leur étude, portant sur les 39 dernières éditions de plusieurs festivals, le collectif montre que si la Berlinale ou la Mostra de Venise programment davantage de films de réalisatrices, elles ne représentent que 11 % de la sélection depuis les années 80.
Qu’en est-il cette année à Cannes ? Sur les 21 films en compétition, seulement 4 sont réalisés par des femmes. La réponse de la direction du Festival est, cette année, la même que les précédentes : très peu de films réalisés par des femmes sont sélectionnés, car très peu leur sont proposés. C’est pour vérifier cette assertion que les membres du collectif 50/50 ont fait signer l’an dernier à Cannes, et à une cinquantaine d’autres festivals dans le monde, une charte les obligeant à communiquer sur les chiffres des films soumis à la sélection.
Le résultat, cette année sur la Croisette, semble accréditer la thèse d’un choix trop restreint pour atteindre la parité, ou s’en rapprocher : selon les chiffres communiqués par Thierry Frémaux, directeur délégué du festival, seuls 26 % des films proposés au comité de sélection ont été réalisés par des femmes. Qui en a retenu, au final, 19 % dans la liste des films en lice pour la palme d’or. Même chose pour la Quinzaine des réalisateurs, avec 16 % de films dirigés par des femmes dans la sélection finale, pour 24 % de films soumis. La Semaine de la critique, en revanche, fait bonne figure avec 26 % de films réalisés par des femmes présentés, après en avoir reçu 27 %.
Le problème semble donc ailleurs, comme le reconnaît Julie Billy, productrice et coprésidente du collectif 50/50. « Il y a un vrai manque de films réalisés par des femmes à l'international, mais la sélection cette année est finalement assez cohérente. 50 % de femmes sortent d'école de cinéma, mais c'est le passage au premier long métrage qui fait chuter les chiffres. Notre problématique est donc la suivante : comment faire pour dépasser ce plafond de verre ?»
Une première mesure concrète a déjà été mise en place, toujours à l’initiative de ce collectif depuis le mois de janvier par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) : celui-ci accorde désormais 15 % de fonds de soutien en plus pour les projets de films dont les équipes sont paritaires.
Bien cordialement