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Non, Philippe Martinez ne soutient pas LREM aux européennes (José Bové et Robert Hue non plus)

Depuis une semaine, plusieurs tribunes et articles datant du deuxième tour de la présidentielle de 2017 refont surface, laissant penser que le secrétaire général de la CGT, l'eurodéputé écologiste, et l'ancien patron du Parti communiste soutiennent Macron et la liste Renaissance (liens signalés sur Facebook).
(Capture d'écran Facebook / Page Abolition des privilèges)
publié le 23 mai 2019 à 12h50

«Philippe Martinez […] appelle à voter Macron […] Dans l'Humanité, 30 dirigeants de la centrale syndicale signent – ce doit être une première – une tribune favorable à un banquier d'affaires», lit-on dans un post Facebook partagé plusieurs centaines de fois (1) par une page qui relaye notamment des contenus virulents à l'endroit du président de la République.

Ce texte date du 17 mai. Or, le matin même, on retrouve un message similaire sur… le compte Twitter parodique @Team_Macron. Dans un précédent article, CheckNews vous expliquait que ce compte ne fait pas mention de son caractère parodique de manière explicite, et il est courant que ses publications soient prises pour vrai.

Dans son tweet, @Team_Macron_ renvoie vers un article du Monde intitulé «Martinez souhaite que "Macron fasse le score le plus haut possible"». Cet article est vrai, mais date du 5 mai 2017, juste avant le second tour de la présidentielle qui opposa Marine Le Pen à Emmanuel Macron. On y lit «"C'est un vote par défaut", a ajouté [Martinez], en rappelant le positionnement "clair" de sa centrale : "On dit aucune voix pour le FN et on incite les citoyens à aller voter".»

Quant aux «30 dirigeants de la centrale syndicale» qui ont signé une tribune pour appeler à voter Macron dans l'Huma, selon le post Facebook, il s'agit là encore d'une information complètement sortie de son contexte, en l'occurrence celui de l'entre-deux-tours de la présidentielle. «Nous utiliserons le bulletin Macron pour barrer la route à l'extrême droite», écrivaient ainsi des dirigeants syndicaux dans le journal communiste du 3 mai 2017.

José Bové

En cette fin de campagne pour les élections européennes, Martinez et les CGTistes ne sont pas les premiers à faire l’objet de rumeurs par le truchement de vieilles infos remises au goût du jour.

Le 16 mai, une rumeur du même tenant commence à circuler concernant José Bové, notamment sur Twitter. A l'appui, une tribune de l'eurodéputé écologiste titrée «José Bové : "J'appelle sans aucune retenue à voter pour Macron"». Elle est en fait parue dans Libé… le 27 avril 2017. La tribune avait déjà été repartagée sur le réseau social (en laissant penser qu'il s'agissait d'une actualité) avant le 16 mai, mais c'est réellement à partir de cette date que ses partages se multiplient. Le 17, une capture d'écran du titre de la tribune récolte plusieurs centaines de partages sur la page Facebook «Patriotes en colère» (1).

Robert Hue

Dernier cas notable : celui de Robert Hue, ancien patron du Parti communiste. Dès le 13 mai, on trouve des internautes qui partagent sur Twitter une tribune titrée «Robert Hue : "Pourquoi je soutiens Emmanuel Macron"». Aucun ne le précise, mais il s'agit d'un texte paru dans le Monde en mars 2017. Des comptes Twitter reproduisent l'«info» vieille de deux ans, quitte à indiquer de manière erronée qu'elle s'applique aux européennes de 2019, générant des centaines de partages.

Plus étonnant, de grands médias se font avoir. Comme quand le site internet de BFM publie, le 14 mai, un bref papier intitulé «Européennes : Robert Hue apporte son soutien à Emmanuel Macron». Il a été très vite supprimé, relève le Parisien, même s'il subsiste dans les archives du Web. Dans le texte, on lit que Hue «a annoncé vendredi dans une tribune au journal le Monde qu'il soutenait Emmanuel Macron». Effectivement, le texte dans le quotidien est paru un vendredi 10. Mais en mars 2017 et non en mai 2019.

Dans un communiqué du 15 mai, le président du Mouvement des progressistes (fondé par Robert Hue, aujourd’hui retiré de la vie politique) s’est empressé d’apporter un correctif – précisant au passage que le MDP est engagé avec la liste Urgence Ecologie, et non avec la liste Renaissance que mène Nathalie Loiseau.

Pourtant, le lendemain, on a pu entendre la tête de liste FN, Jordan Bardella, railler les soutiens de la liste de LREM en y incluant Robert Hue : «C'est l'arrière-garde et l'arrière-ban qui volent au secours du gouvernement et du pouvoir en place. Jugez plutôt la liste des soutiens les plus récents et notables à Emmanuel Macron : on a vu il y a quelques jours Jean-Pierre Raffarin, Robert Hue […]. Cela ressemble plus à un festival rétro des années 90 qu'à un comité de soutien.»

(1) Pour lutter contre les fake news, Facebook a mis au point un partenariat avec cinq fact-checkers français (dont Libération). Des articles très partagés sur les réseaux sociaux et signalés par des utilisateurs sont vérifiés par les médias français.