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L'interdiction de la fessée en Suède a-t-elle fait baisser la délinquance ?

Le 2 juillet, le Parlement français a adopté la loi relative à «l’interdiction des violences éducatives ordinaires», désormais inscrite dans le code civil. La Suède, elle, a banni tout châtiment corporel envers les enfants en 1979.
Image mise en scène d'un enfant recevant une fessée (Photo Loïc Venance. AFP)
publié le 19 juillet 2019 à 7h27

Question posée par Antoine Blanc le 10 juillet 2019

Bonjour,

Nous avons reformulé votre question, qui était : «Dans une vidéo postée sur Twitter le 2 juillet par Brut sur l'abolition de la fessée et des châtiments corporels en Suède, la pédiatre Edwige Antier semble faire un lien entre la loi sur l'abolition des châtiments corporels de 1979 et la baisse (elle parle d'effondrement) des chiffres de la délinquance. Une telle corrélation est-elle positivement avérée ou bien s'agit-il d'une association un peu hâtive de Mme Antier ?»

Vous faites référence à ce tweet :

La vidéo reprise par Brut est à l'origine une vidéo de l'AFP de 2015. Edwige Antier y tient les propos suivants : «En Suède, les châtiments corporels, tous les châtiments corporels, la fessée, le tirage d'oreilles... sont abolis. Eh bien en Suède, les résultats scolaires sont parmi les meilleurs des pays européens et la délinquance s'est effondrée au point que les prisons sont vides aujourd'hui parce que quand vous ne tapez pas les enfants, vous enlevez les racines de la violence dans une société».

Interrogée par CheckNews sur les sources qui lui permettent d'établir un lien entre interdiction des châtiments corporels et baisse supposée de la délinquance en Suède, résultats scolaires des Suédois en hausse et désertification des prisons, Edwige Antier répond : «On peut décider qu'il y ait un lien ou non. J'ai simplement fait le rapport entre la chute du taux de délinquance et la désertification des prisons avec la loi de 1979. Je ne vois pas comment cela ne peut être lié. Je me base sur ma propre expérience de deux générations de patients.»

La pédiatre cite également cet entretien de Norman Bishop, fondateur du département de recherche et de développement de l'administration pénitentiaire suédoise et expert pour le Conseil de l'Europe sur les questions pénitentiaires, daté de 2016. Sauf qu'aucune mention n'est faite, dans cette interview, de l'interdiction des châtiments corporels sur les enfants par Norman Bishop, qui attribue la désertification des prisons aux politiques carcérale et pénale suédoise.

Norman Bishop évoque cependant une «diminution du taux de délinquance». Or d'après les statistiques disponibles en ligne du Conseil national suédois pour la prévention de la délinquance, le nombre d'infractions recensées est en hausse constante depuis 1975, à l'exception des vols.

En revanche, le Conseil précise que les statistiques suédoises «enregistrent tous les événements signalés comme des crimes, même s'il est avéré que certains d'entre eux ne constituent pas des infractions pénales».

Pour ce qui est des résultats scolaires suédois, qu’Edwige Antier affirme être parmi les meilleurs d’Europe, la Suède ne se classait que onzième des pays européens en mathématiques, à un point devant la France, onzième en sciences, à un point derrière la France et neuvième en lecture, à un point devant la France, selon la dernière étude Pisa menée par l’OCDE en 2015. La Suède se situe en fait dans la moyenne en termes de résultats scolaires.