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Des propriétaires terriens brésiliens ont-ils lancé un «jour du feu» le 10 août ?

Selon un média brésilien, 80 personnes se seraient organisées via WhatsApp pour déclencher des incendies dans la région de Novo Progresso dans l'Etat du Para au Brésil, traversé par la forêt amazonienne.
Photo aérienne publiée par Greenpeace montrant la fumée s'échappant d'incendies de forêt dans le biome amazonien de la municipalité d'Altamira, dans l'État du Para, au Brésil, le 23 août 2019. (VICTOR MORIYAMA/Photo Victor Moriyama. Greenpeace. AFP)
publié le 27 août 2019 à 17h07

Question posée par Sébastien le 22/08/2019

Bonjour,

Nous avons modifié votre question qui était à l'origine : «Les propriétaires terriens brésiliens ont-ils lancé un "jour de feu" le 10 août 2019 avec la bénédiction des autorités brésiliennes ?»

Plusieurs internautes, dont Ivan du Roy, journaliste et fondateur de Basta!, ont parlé ces derniers jours sur Twitter d’un «jour du feu», action qui aurait été organisée par des propriétaires terriens dans l’Etat du Para au Brésil, où se trouve une partie de l’Amazonie, pour incendier des parcelles de forêt le long et autour de l’autoroute BR-163.

Dans deux articles publiés le 25 août, le site internet de l'émission brésilienne Globo Rural confirme l'organisation d'un tel jour dans la région de Novo Progresso, après les révélations du journal local Folha do Progresso. D'après Globo Rural, 70 personnes, «syndicalistes, producteurs ruraux, commerçants et grileiros [voleurs de terres, ndlr]», des régions de Novo Progresso et Altamira ont coordonné une action pour incendier les bas-côtés de la BR-163, le 10 août, via un groupe de discussion créé sur WhatsApp.

Selon cet autre article de Globo Rural, l'idée d'un jour de feu avait été lancée dans un premier groupe sur la même application de messagerie réunissant 246 participants actifs, dont des agriculteurs, commerçants, syndicalistes et grileiros de la région de Novo Progresso. Parmi eux, 70 personnes, bientôt rejointes par 10 autres, qui ont approuvé cette idée créant un second groupe de discussion baptisé «SERTÃO».

Le ministre de l'Environnement, Ricardo Salles, a réagi sur Twitter dimanche suite aux révélations de Globo Rural, indiquant que le président du Brésil, Jair Bolsonaro, a décidé d'ouvrir une enquête sur les faits relatés.

Lundi, Globo Rural écrivait qu'au moins quatre membres du groupe de discussion WhatsApp  ont été arrêtés pour des crimes environnementaux dans la région. Certains d'entre eux ont conclu une entente avec les tribunaux et portent des bracelets électroniques.

C'est le journal local de Novo Progresso, Folha do Progresso, qui a d'abord dévoilé des informations sur le «jour du feu». Publié le 5 août dernier, l'article relate un entretien entre un journaliste de Folha do Progresso, des agriculteurs et des éleveurs de la région autour de l'autoroute BR-163. Ces derniers auraient déclaré avoir fixé au 10 août une date pour allumer des «feux de défrichement». Cette action aurait été décidée dans le but «d'attirer l'attention des autorités sur le fait que le développement des cultures se fait sans aide gouvernementale dans la région. Nous voulons montrer au président que nous avons besoin de travailler et que le seul moyen est l'abattage d'arbres. Et pour nettoyer les terres, l'unique moyen est le feu», peut-on lire dans l'article.

Ces informations ont ensuite été reprises par le quotidien national Folha de Sao Paulo, qui publie une carte dans son article sur le sujet, reprise par la suite sur les réseaux sociaux. Cette carte, visible ci-dessous, montre les feux dans la région de Novo Progresso autour de la route BR-163, matérialisée en violet, entre le 10 et le 11 août. Il s'agit d'images d'un satellite de la Nasa, que l'on peut retrouver sur le site de l'Institut national de recherche spatiale du Brésil (Inpe).

Si on compare cette carte à celle des 8 et 9 août, on s'aperçoit que le nombre de feux déclarés dans la région est effectivement plus important les 10 et 11 août, même s'il est impossible d'établir formellement un lien avec le «jour du feu». Dans son article sur le «jour du feu», Globo Rural écrivait que «le 10 août, le nombre d'incendies avait soudainement augmenté en Amazonie».

Globo Rural s'est par ailleurs procuré un rapport du ministère public fédéral de l'Etat du Para envoyé à l'Institut brésilien de l'environnement et des ressources naturelles renouvelables (Ibama), qui dépend du ministère de l'Environnement. Daté du 7 août, ce document met en garde contre le possible projet de producteurs ruraux de déclenchement d'incendies dans la région de Novo Progresso, comme forme de protestation. Il comprend aussi un plan d'urgence en cas de «confirmation de cet événement». L'Ibama a répondu au ministère public le 12 août. «En raison des diverses attaques subies et du manque de soutien de la police militaire du Pará, les actions d'inspection dans l'État sont entravées par le fait qu'elles comportent des risques liés à la sécurité des équipes de terrain. Je signale que des fonctionnaires ont déjà été dépêchés pour demander l'appui de la Force de sécurité nationale, mais il n'y a pas eu de réponse jusqu'à présent», peut-on lire sur le document publié par le site Poder 360.

Cordialement

Mise à jour 27/08 : Précisions sur le groupe WhatsApp et ajout de la réponse de l'Ibama.