Question posée par Catherine le 02/12/2019
Bonjour,
Vous nous avez posé cette question que nous avons raccourcie : «Des personnes durant un happening ont-elles appelé à brûler à l'essence des criminels comme le prétend Yahoo ainsi que Fdesouche, un blog d'ultra droite ?» Vous joignez en lien une vidéo publiée par le compte Twitter «Yahoo Actualités» visionnée près de 98 000 fois, dans laquelle on entend un groupe de femmes rassemblées sur la place du Trocadéro, à Paris, chanter le slogan suivant : «Le kérosène, c'est pas pour les avions, c'est pour brûler violeurs et assassins !»
« Le kérosène, c’est pas pour les avions, c’est pour brûler violeurs et assassins ! ». Les militantes ont entonné des slogans chocs pic.twitter.com/i1YpPXXHNR
— Yahoo Actualités (@YahooActuFR) November 29, 2019
Cette vidéo fait partie d’une série de tweets consacrés au rassemblement, vendredi, de plusieurs dizaines de personnes qui étaient venues reproduire, un bandeau sur les yeux, la chorégraphie et le chant devenus viraux du collectif de féministes chiliennes Las Tesis, dénonçant les responsables des violences faites aux femmes (et dont vous pouvez voir l’une des performances ci-dessous).
A Paris, mais aussi à Toulouse ou Nantes, et dans le monde entier, des féministes ont répondu à l'appel des Chiliennes qui invitaient «les femmes et les dissidences» à reproduire leur mise en scène vendredi. «La coupable ce n'est pas moi, ni mes fringues ni l'endroit. Le violeur, c'est toi. C'est la police, c'est la justice, c'est l'Etat, c'est la société», ont ainsi entonné les participantes au rassemblement du Trocadéro, en écho aux paroles originales, avant de poursuivre avec des revendications plus françaises : «Le Grenelle, on n'y a pas cru. Macron, Philippe, on n'en peut plus. Le milliard, on ne l'a pas eu», ont-elles scandé.
Le texte traduit «par des filles de Toulouse» pour l'occasion, «n'est pas une traduction littérale du texte», explique à CheckNews Camille Lextray, membre du collectif de «colleuses» de Paris qui a participé à l'organisation de l'événement. «Il fallait adapter le message à chaque pays. Le texte a un ancrage international et français.»
Mais le slogan sur lequel vous nous interrogez ne figure pas dans le texte scandé par les militantes vendredi, comme on peut le voir sur le live retransmis par Brut. Alors que la chorégraphie prend fin, plusieurs slogans féministes sont chantés par des participantes. Après avoir appelé à «la solidarité avec les femmes du monde entier», quelques manifestantes reprennent en chœur la formule : «Le kérosène, c'est pas pour les avions, c'est pour brûler violeurs et assassins !» Contactée, une des manifestantes qui apparaît sur la vidéo en train de chanter n'a pas souhaité répondre à nos questions sur l'origine de ces paroles.
Elles semblent toutefois être inspirées du slogan : «Le kérosène, c'est pas pour les avions, c'est pour brûler les flics et les patrons», scandé notamment par des militants à Nantes en 2016 par exemple, ou plus récemment lors de la marche pour le climat en mai 2019.
Le chant des gentils zadistes :
— Memento NDDL (@17jan2018) October 11, 2016
« Le kérosène c'est pas pour les avions
C'est pour brûler les flics et les patrons » #NDDL pic.twitter.com/jUSisU9K5g
La formule «n'a pas fait l'unanimité, mais les femmes présentes n'appartenaient pas un collectif spécifique. Il y avait des colleuses, des membres de Nous toutes, et d'autres», remarque de son côté Fanny, colleuse elle aussi et partie prenante dans l'organisation de l'évènement. Sur le fond, la militante estime qu'il «faut prendre le slogan au second degré. Il faut le comprendre comme : on ne se laissera plus faire, et la peur doit changer de camp. Si on se formalise sur le premier degré, on se trompe de combat. C'est qu'on n'a pas compris d'où vient la violence principale.»
Camille Lextray, qui explique avoir été contactée par plusieurs médias à ce sujet, reproche de vouloir «polariser le débat sur ce slogan» qui est avant tout «un moyen de se réapproprier la violence subie». «L'objectif du rassemblement était de montrer notre soutien au mouvement de Las Tesis et de montrer que leur appel a été entendu», ajoute Fanny.