Question posée par ROUSSELLE le 11/01/2020
Bonjour, votre question a été raccourcie, la voici en intégralité : «On trouve sur les RS que Laurent Brun aurait déclaré : "Ce sera la guerre totale. Jusqu'à la fin. La SNCF sera par terre mais la CGT sera debout. La guerre à outrance n'est pas pour me déplaire. La seule sortie possible c'est la révolution." Info ou intox ? D'avance merci.»
Votre question renvoie à une déclaration prêtée au responsable de la CGT cheminots, Laurent Brun, par de nombreux internautes. Le propos a été rapporté la première fois par le Figaro dans un article daté du 21 décembre et intitulé : «Grève à la SNCF : face aux ultras, l'exécutif brandit la menace des réquisitions». L'article débute par le récit d'une entrevue entre le secrétaire d'Etat aux transports, Jean-Baptiste Djebbari, et le secrétaire général de la CGT cheminots. Voici le premier paragraphe :
«Jean-Baptiste Djebbari ne s'attendait pas à entendre de tels propos. A l'issue d'un entretien d'une heure et demie avec le secrétaire d'Etat aux Transports, le secrétaire général de la CGT-cheminots s'est lâché. "Ecoutez. Personne ne gagne une grève par KO. Je suis capable d'assumer de vrais compromis mais vous ne m'en proposerez jamais. Donc ce sera la guerre totale. Jusqu'à la fin, a menacé Laurent Brun. La SNCF sera par terre mais l'appareil [de la CGT, NDLR] sera debout. La guerre à outrance n'est pas pour me déplaire. La seule sortie possible, c'est la révolution."»
Il s'agit donc d'un propos rapporté du leader de la CGT (sans que l'auteur de l'article ne précise la source), indiquant en substance qu'il y aura une «guerre totale», en raison de l'absence de compromis proposé par le gouvernement. La phrase a depuis été largement reprise, le plus souvent en lui enlevant sa première partie, comme dans cet article des Echos, où on lit simplement : «Ce sera la guerre totale. La SNCF sera par terre mais l'appareil de la CGT sera debout. La guerre à outrance n'est pas pour me déplaire. La seule sortie possible, c'est la révolution.»
Une «manipulation grossière», selon Laurent Brun
Laurent Brun a réagi à la polémique qui a suivi l'article du Figaro. Interrogé par l'Humanité, le 24 décembre, sur les nombreuses réactions à la déclaration qui lui est prêtée, le patron des cheminots CGT a dénoncé une manipulation : «Il s'agit d'une manipulation grossière, sur la base de propos largement déformés tenus lors d'une rencontre entre Jean-Baptiste Djebbari, son assistant, moi-même et mon adjoint. Personne d'autre n'était là pour les entendre. C'est donc forcément du côté du gouvernement que les fuites ont été organisées. Mon propos original était de dire que, si le gouvernement continuait dans sa logique, il mettrait à terre la SNCF. Et on ne parlait pas de la réforme des retraites mais de la réforme ferroviaire de l'an dernier, du financement du système et du fonctionnement du fret. Mon raisonnement était de montrer que le gouvernement était dans l'erreur en considérant que, pour faire disparaître les revendications des salariés, il n'y a qu'à détruire les syndicats. C'est ce qu'ils ont tenté l'an dernier en ne lâchant rien pendant le conflit de trois mois. Le résultat c'est qu'aujourd'hui, nous retournons en bataille. Donc, ils ne nous ont pas détruits, et ils ne nous détruiront pas tant qu'il y aura de l'exploitation et des difficultés pour les salariés. Quant à la révolution, c'est le ministre qui y a fait référence en décrétant que certains à la SNCF voulaient la révolution et qu'on ne pouvait pas discuter. J'ai répondu que, si la révolution est nécessaire, nous étions là pour parler des revendications. On peut combattre la logique de ce gouvernement parce qu'elle est mauvaise, mais on reste ouvert à la discussion pour autant.»
Cette mise au point n'a pas empêché certains commentateurs, voire journalistes, de reprendre depuis une partie de phrase. Yves Calvi, lors d'une interview de la secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Amélie de Montchalin, le 3 janvier sur RTL, rapportait à son tour la déclaration prêtée à Laurent Brun en ajoutant que ces propos ont été «tenus et assumés». Ce qui, au moins pour le deuxième qualificatif, est inexact, puisque Laurent Brun conteste avoir tenu les propos tels qu'ils sont présentés.
Cordialement