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7 Octobre, un an après : pourquoi le décompte des victimes de l’attaque du Hamas a été aussi difficile

En excluant les assaillants du décompte, autour de 1 200 personnes ont péri lors des attaques ou des suites de blessures infligées la journée du 7 Octobre. Une grande majorité étaient des civils.
Lors des funérailles de May Naim, 24 ans, le 11 octobre 2023, tué lors de l'attaque du Hamas au festival Nova le 7 Octobre. (Amir Levy/Getty Images via AFP)
publié le 6 octobre 2024 à 14h45

L’ampleur du massacre du 7 Octobre a longtemps rendu difficile d’en prendre la mesure exacte. Et encore aujourd’hui, un an après, des chiffres différents circulent quant au bilan, même si tous s’accordent sur un total proche de 1 200 morts, dont une grande majorité de civils.

Durant le premier mois suivant les attaques du Hamas sur le sol israélien, le 7 octobre 2023, le bilan humain s’avérait très incertain – aucune source officielle ne présentant la liste des victimes, leur nom, leur sexe, leur âge, ou leur statut (civil, militaire ou policier). Une première estimation portait le nombre de victimes autour de 1 400. Tous les corps n’avaient toutefois pas été retrouvés, ni ceux découverts identifiés.

Mi-novembre, les autorités israéliennes ont révisé sensiblement à la baisse ce premier bilan, passant de 1 400 à 1 200 morts. Comme nous l’avions expliqué dans un article publié début novembre, sur les «environ 1 400 corps» de victimes amenés dans les morgues, un nombre conséquent appartenait en fait à des assaillants venus de Palestine.

Quoique encore provisoire, ce bilan établissait alors environ deux tiers de civils parmi les victimes, et suffisait alors à infirmer les allégations colportées sur les réseaux sociaux qui, minorant la part des civils tués, affirmaient que la majorité des morts du 7 Octobre étaient des soldats. Dès les premiers jours après l’attaque, le Hamas n’a eu de cesse d’affirmer que les civils n’ont pas été ciblés, en dépit d’innombrables preuves du contraire.

A contrario, les précisions apportées progressivement sur le bilan ont également permis de mettre à mal des éléments de propagande israélienne, et notamment la macabre allégation des 40 bébés tués par le Hamas dans le seul kibboutz de Kfar Aza, infirmée par toutes les informations disponibles : en décembre, la Sécurité sociale israélienne chiffrait ainsi le bilan total de l’attaque à 695 civils israéliens (hors forces de sécurité), dont 36 mineurs, parmi lesquels deux bébés.

Le bilan a continué à évoluer ces derniers mois, l’identification de certains restes humains étant extrêmement longue. Ainsi, 17 personnes, initialement présumées otages, ont finalement été identifiées comme ayant été tuées sur le sol israélien, et n’en ayant jamais bougé. Se sont également ajoutés au bilan les noms des personnes dont les corps ont été emportés à Gaza (37 personnes), et dont on s’est rendu compte qu’elles avaient été assassinées le 7 Octobre. Parmi elles, on peut citer la Germano-Israélienne Shani Louk (qui est passé, le 30 octobre, du statut d’otage présumée vivante à otage décédée), ou la Franco-Israélienne Ruth Perez (le 5 novembre). A l’inverse, une fillette de 8 ans initialement considérée comme morte s’est révélée, un mois plus tard, compter au nombre des otages – et a depuis été libérée.

Au moins 806 civils tués le jour J

Les décomptes de victimes civiles réalisés par les autorités israéliennes excluent notamment les membres de la police et des services de sécurité nationaux (Shin Bet). Respectivement, 60 et 6 victimes. Cette catégorisation peut faire débat puisque, comme le relève Human Rights Watch dans un rapport paru en juillet 2024, la police et les membres des équipes d’intervention rapide qui n’ont pas un rôle de combat permanent «sont normalement [considérés comme] des civils au sens du droit de la guerre». A noter également que les membres des équipes de sécurité locale des kibboutz qui avaient le statut de réservistes de l’armée sont désormais comptabilisés parmi les «membres des forces armées» par les autorités, et non comme des civils.

Une incertitude persiste, un an après les attaques, sur le nombre exact des civils tués le 7 Octobre (police et forces de services de sécurité exclues). Actuellement, en croisant les différentes bases de données publiques israéliennes avec celles diffusées par les familles de victimes, le décompte semble provisoirement arrêté autour de 806 individus, toutes nationalités confondues.

Outre cinq pompiers et neuf membres de services de soin (Maguen David Adom, équivalent israélien de la Croix-Rouge) également décomptés à part par les autorités israéliennes, près de 800 identités de victimes sont listées par les différentes sources officielles. Avec quelques imprécisions. Ainsi, sur le site du ministère israélien des Affaires étrangères, la transcription en alphabet latin de certains patronymes hébreux, thaïlandais ou chinois semble avoir mené à présenter quelques doublons (une dizaine). A l’inverse, plusieurs victimes dont le statut est confirmé par des sources indépendantes sont encore, à ce jour, absentes de cette source de référence. Par ailleurs, en consultant les bases de données publiques de sites dédiés à la généalogie, on peut identifier divers noms de personnes signalées mortes le 7 Octobre dans les kibboutz attaqués, dont quelques-uns (pour l’essentiel, des civils non israéliens) ne figurent pourtant encore dans aucune liste officielle. Nos investigations n’ont, pour l’heure, pas permis de déterminer s’il s’agit d’une erreur du côté des généalogistes ou du côté du recensement officiel israélien.

A ce jour, le ministère dénombre 778 identités distinctes de civils, plus les 14 pompiers et membres de Maguen David Adom, soit 792 individus. Un chiffre auquel s’ajoutent a minima les noms de 14 personnes dont la mort dans les attaques est confirmée par plusieurs sources indépendantes, mais qui ne sont pas encore présents dans cette liste officielle. Soit l’estimation minimale de 806 civils (au sens restreint) tués le jour J, cité plus haut. Un chiffre qui inclut les victimes dont le corps a été emporté à Gaza, mais exclut les personnes mortes en captivité (quatorze confirmés à ce jour).

En se référant à un décompte réalisé plutôt dans l’année par l’Agence France Presse, au moins 282 des civils tués dans les attaques étaient des femmes – soit plus du tiers de ces victimes.

Presque une moitié des civils tués lors du festival Nova

Sur les 778 noms de victimes civiles «pompiers et services de soin exclus» présentés sur le site du ministère des Affaires étrangères israéliens, on compte 374 personnes tuées (369 en enlevant les doublons), soit près de la moitié des victimes civiles, lors du festival Nova. Le ministère israélien estime à ce jour que 66 ressortissants étrangers (hors binationaux israéliens) ont été assassinés le 7 Octobre : 39 Thaïlandais, dix Népalais, quatre Philippins, quatre chinois, deux Sri-Lankais, un Britannique, deux Erythréens, un Cambodgien, un allemand, un soudanais et un Canadien. Toutefois, il semble que certains ressortissants étrangers ne sont, là aussi, pas encore comptabilisés par les autorités.

Enfin, selon les données disponibles, autour de 311 militaires seraient décédés des suites directes des combats du 7 Octobre. Comme évoqué plus haut, on y trouve plusieurs victimes initialement comptabilisées comme «civils» dans les listes officielles, et dont le statut a changé après que l’armée les a reconnues, à titre posthume, comme «soldats tombés au combat», dans la mesure où ils étaient réservistes et membre d’équipes de sécurité locales dans leur kibboutz.

Sur les seules journées du 7 et du 8 octobre, on décompte 296 morts membres des forces de défense israélienne. Quatorze autres sont décédés durant les deux jours suivants (sans qu’il soit toutefois toujours possible de savoir si le décès découle de blessures datant du jour même de l’attaque, ou si celles-ci sont survenues lors des premières manœuvres de représailles). On note également un soldat mort le 27 octobre, des suites directes de blessures qui lui ont été infligées le jour des massacres.