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A quelles conditions un produit peut-il bénéficier du label «fabriqué en France» ?

La mention «fabriqué en France» peut être apposée sur tous les biens ayant «subi leur dernière transformation substantielle» sur le sol français. Ce qui recouvre des réalités variables d’un produit à l’autre.
Au salon du Made in France à Paris, en 2021. (Denis Allard/Libération)
publié le 10 novembre 2023 à 14h25

Alors que le label «Fabriqué en France» vient de fêter son deuxième anniversaire, le salon du Made in France a ouvert ses portes, jeudi 9 novembre, au parc des expositions de Paris. «Venez-y découvrir tout le Fabriqué en France», a écrit la chambre de commerce et d’industrie de la région Ile-de-France sur le réseau social X (anciennement Twitter). Et selon le fondateur de la marque Le Slip français, interviewé dans la matinale de RMC jeudi matin, «tout l’enjeu du salon du Made in France qui s’ouvre aujourd’hui, c’est comment est-ce qu’on arrive à fabriquer en France et vendre à un prix qui est compétitif».

Cette présentation peut suggérer que le salon n’accueille que des produits dont la fabrication est 100 % basée sur le sol français. Ce qui est inexact. Parmi les produits exposés, certains peuvent avoir été principalement fabriqués à l’étranger, puis simplement transformés sur le sol français. «La mention “fabriqué en France” ne signifie pas que 100 % des étapes de fabrication d’un produit ont été réalisées en France, mais qu’a minima, une partie significative de la fabrication du produit a été réalisée en France», précise une page d’information destinée aux particuliers sur le site du ministère de l’Economie et des Finances. De ce fait, indique une autre page à destination cette fois des professionnels, si «un produit entièrement fabriqué en France peut afficher la mention “fabriqué en France”», c’est aussi le cas pour «un produit partiellement fabriqué» à condition qu’il ait «subi sa dernière transformation substantielle en France».

Sanctions

Qu’entendre par l’expression «transformation substantielle» ? Les règles sont variables selon les catégories de produits. La plupart du temps, cette transformation substantielle correspond à un changement de «classification douanière» : parce que les composants ou matières premières intégrés au produit fini différent de ceux du produit initial, il reçoit un nouveau code de la part des douanes françaises. «Cette règle s’applique par exemple aux produits de beauté, poupées, jeux de société, couteaux de table, sommiers», détaille la direction générale des entreprises (DGE). Dans d’autres cas, le produit doit respecter un pourcentage minimal de valeur ajoutée produite en France, qui porte sur le prix «sortie d’usine». Ce seuil est fixé à «45 % pour les voitures, les vélos ou les montres», note la DGE. La règle peut reposer, s’agissant des produits textiles, sur la réalisation d’une transformation «spécifique», quand par exemple les fibres du vêtement ont été filées en France. Enfin, pour être homologués «fabriqué en France», certains produits ne peuvent pas dépasser un certain pourcentage maximal en poids ou en valeur de matières non originaires de France.

Si la mention n’implique pas que le produit ait été intégralement fabriqué en France, il ne peut ne pas non plus avoir été uniquement «conçu», «désigné», «assemblé», «élaboré» ou encore «conditionné» en France, pour être présenté comme Made in France. Et si l’apposition d’un «fabriqué en France» est facultative, une mauvaise utilisation de cette mention peut entraîner des sanctions. Elle relève en effet de la pratique commerciale trompeuse, punie à l’article L. 132-2 du code de la consommation, d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende.

Contraintes

Dans les allées du salon du Made in France, on apercevra ainsi du café ou du thé «fabriqué en France», ce qui est accepté dès lors qu’il est admis que le «savoir-faire français» intervient suffisamment dans la conception du produit, par exemple dans le processus de torréfaction. Et ce même si les grains de café et feuilles de thé sont nécessairement importés de pays lointains. On pourra aussi acheter des cosmétiques et parfums «développés, testés, fabriqués et conditionnés en France», bien que composés d’ingrédients «100 % d’origine naturelle» mais pas 100 % d’origine France. De même, on trouvera des jeans «dessinés, teints, tissés, coupés, cousus en France» à partir de coton biologique importé de Tanzanie.

S’agissant des couteaux, là aussi la fabrication est française, mais avec des matériaux pas uniquement hexagonaux. Le fabricant Nogent***, qui figure parmi les exposants, confirme ainsi à CheckNews : «Certaines matières premières viennent de France, comme le bois et le plastique des manches. En revanche, l’acier des lames vient d’Autriche car le seul producteur européen d’acier se trouve là-bas.» C’est finalement une nécessité : que ce soit pour l’acier ou d’autres, l’origine des matières premières est forcément soumise à certaines contraintes. Basiquement, «le café, le cacao, le coton, on ne peut pas se le procurer en France», pointe Amandine Hesse, la présidente de la Fédération indépendante du made in France, une fédération de consommateurs destinée à promouvoir le made in France. La mention «fabriqué en France» peut donc aussi parfois englober des transformations à la marge. «De toute façon, pour toutes les étapes de fabrication où les entreprises ne disent rien, c’est qu’elles ne sont pas faites en France, sinon ce serait dit», postule Amandine Hesse. Qui tient quand même à alerter : «Le fait d’apposer une fermeture éclair ou une étiquette sur un produit ne permet pas de conférer le caractère “made in”.»