C’était le meilleur candidat – voire le seul – à un signe d’origine extraterrestre. Le 15 août 1977, l’astronome Jerry Ehman recense un signal capté par le radiotélescope de l’université de l’Ohio, réunissant plusieurs caractéristiques attendues d’un message émis par une civilisation lointaine. Impressionné par l’intensité du signal – codé «6EQUJ5» – il y annote dans la marge le mot «Wow !» en rouge, qui lui donnera ensuite son nom.
Mais quarante-sept ans plus tard, une recherche, publiée le 16 août par des chercheurs de l’Université de Porto Rico à Arecibo, vient battre en brèche cette piste. L’hypothèse novatrice avancée dans ces travaux est que le signal «Wow !» serait le «premier événement enregistré d’une éruption maser astronomique». Le résultat, en somme, d’un événement «naturel».
Cette hypothèse permet en effet d’expliquer les trois principales caractéristiques qui fondent l’intérêt du signal «Wow !». En premier lieu, son intensité. Le pic du signal a en effet atteint trente fois le bruit de fond de l’univers. La série de chiffres et de lettres «6EQUJ5» correspond d’ailleurs à la notation de l’intensité du signal. Toutes les douze secondes, elle était enregistrée et notée de 1 à 9, puis de A à Z.
Deuxième élément intéressant : le signal a été émis sur une fréquence très proche de celle à laquelle un atome d’hydrogène émet des radiations – 1 429,4556 MHz contre 1 420,405751 MHz. Soit précisément celle sur laquelle certains astronomes jugent plausible de recevoir un message émis par une entité extraterrestre, en raison de sa capacité à passer au travers des poussières interstellaires, de se répandre dans l’univers, et donc d’être réceptionné par un interlocuteur.
Enfin, le signal a été émis sur une bande étroite de fréquence : moins de 10 kHz. Or il était admis qu’on ne connaissait pas d’événement naturel capable d’émettre avec une telle intensité sur cette bande étroite.
Laser micro-onde astrophysique
Tout du moins jusqu’à maintenant. Car l’équipe de l’Université de Porto Rico a justement identifié un signal d’origine naturel, doté des mêmes caractéristiques. Avec son projet «Arecibo Wow !», l’équipe portoricaine a observé entre 2017 et 2020 de nombreuses cibles avec un télescope géant. Dans le résumé de sa recherche, l’équipe annonce «la détection de signaux à bande étroite (10 kHz) près de la ligne d’hydrogène similaire au signal Wow !, bien que de deux ordres de grandeur moins intenses et à plusieurs endroits».
Ces signaux correspondent à quatre enregistrements repérés à proximité d’une minuscule naine rouge – une petite étoile beaucoup moins chaude que le Soleil – appelée l’étoile de Teegarden, située à 12,5 années-lumière de la Terre. Selon l’analyse des chercheurs, ces signaux proches de l’étoile de Teegarden sont associés à des nuages interstellaires d’hydrogène froid. Ils évoquent alors l’hypothèse d’une puissante éruption de rayonnement ayant traversé un nuage d’hydrogène froid, stimulant le gaz à produire une puissante impulsion de rayonnement proche de 1 420 MHz, donc voisine de la fréquence déjà citée de «Wow !». Avec comme résultat final un laser micro-onde astrophysique naturel, ou maser, délivrant une concentration intense de lumière à bande étroite (10 kHz), similaire donc au signal «Wow !».
Autres objets cosmiques
Quid de l’intensité faible des signaux observés par l’équipe de Porto Rico ? Pour les chercheurs, la naine rouge Teegarden n’est probablement pas capable de produire une éruption suffisamment puissante pour obtenir l’intensité constatée pour le signal «Wow !». Mais d’autres objets cosmiques, tels que les étoiles à neutrons, pourraient tout à fait en être capable.
Reste que la recherche n’a pas encore été évaluée par les pairs – c’est-à-dire par d’autres astronomes – alors qu’il s’agit d’une étape cruciale pour juger de la crédibilité d’une étude. En 2016, un universitaire de la Washington Academy of Sciences avait publié un article indiquant la découverte de deux comètes émettant beaucoup d’hydrogènes, dans le champ de vision du télescope de l’Ohio en 1977. Il formulait alors l’hypothèse que l’une des deux comètes était à l’origine du signal «Wow !». Mais, après relecture par les pairs, ceux-ci ont largement conclu à la non-crédibilité de la «thèse des comètes». L’hypothèse «maser» reste donc à confirmer.