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Combien de députés Ensemble ont été élus grâce aux désistements de candidats LFI lors des législatives de 2024 ?

Les insoumis ont largement joué le jeu du barrage républicain. Facilitant ou permettant l’élection d’une trentaine de députés de la majorité.
Photo de famille du groupe Ensemble, lors de la journée d'accueil des députés nouvellement élus à l'Assemblée nationale, à Paris le 22 juin 2024. (Albert Facelly/Libération)
publié le 23 août 2024 à 18h41
Question posée par Clément D, le 22 août

A l’heure où Emmanuel Macron réunit les chefs des différentes formations politiques présentes au Parlement, la plupart des responsables de la majorité refusent toujours de voir LFI entrer au gouvernement. Sur France Inter, ce jeudi, la ministre démissionnaire Aurore Bergé a prévenu que «nommer demain quelqu’un issu du Nouveau Front populaire, sachant que les membres de la France insoumise seraient des membres du gouvernement, c’est s’exposer à une censure immédiate. Le bloc central l’a dit, la droite l’a dit. Donc ils savent qu’ils ne tiennent pas plus de vingt-quatre heures en ayant des membres de la France insoumise en leur sein.»

Cet été, le 13 août, le Premier ministre, Gabriel Attal, et son ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, également secrétaire général du parti Renaissance avaient envoyé séparément des lettres «aux chefs des partis républicains», excluant alors le Rassemblement national et la France insoumise, pour leur proposer de s’allier autour d’un «Pacte d’action pour les Français».

Ces prises de position suscitent, à gauche, de nombreux commentaires, et valent à Checknews plusieurs questions. Comme celle envoyée par Clément D, jeudi : «En écoutant Aurore Bergé, je rumine du positionnement anti-LFI alors qu’il me semble que nombre de députés Ensemble ont été élus grâce à un désistement d’un candidat LFI. Auriez-vous ce chiffre ?»

De fait, face à la menace de voir le RN gagner ces élections législatives, les candidats du Nouveau Front populaire se sont quasiment tous retirés de la course lorsque le parti d’extrême droite était en position de gagner des circonscriptions, permettant au camp présidentiel de remporter 163 sièges.

Un barrage quasi systématique

Les insoumis ont fait leur part dans l’édification de ce barrage républicain : à l’issue du premier tour des élections législatives de juin, 38 candidats portant l’étiquette LFI s’étaient désistés dans le cadre de triangulaires qui les auraient opposés au Rassemblement national et aux partis de l’alliance macroniste Ensemble. L’addition monte même jusqu’à 39, si l’on compte la candidate Nathalie Colin-Oesterlé, membre du parti Les Centristes, contre qui Ensemble n’avait pas présenté de candidats et qui siège désormais au sein du groupe Horizons et Indépendants. Ces désistements de ces candidats insoumis ont facilité – ou permis – l’élection de 35 députés appartenant aux partis soutenant Emmanuel Macron.

Ce barrage n’avait pas été totalement systématique. Ainsi, un candidat insoumis avait refusé de se désister dans cette configuration. Et ce, dans la 10e circonscription des Yvelines, qui est précisément la circonscription… d’Aurore Bergé. Le candidat LFI -NFP Cédric Briolais avait refusé de se retirer après être arrivé en troisième position derrière le candidat RN Thomas du Chalard (28,22 %) et la candidate Renaissance Aurore Bergé (33,59 %). Il s’en était justifié en évoquant un risque de victoire du RN négligeable. La suite lui avait donné raison, Aurore Bergé étant élue avec 49,05 % des voix au second tour.

Si la quasi-totalité des candidats LFI ont joué le jeu du barrage au RN, il est notable qu’il en va de même pour les candidats Ensemble, y compris en faveur des candidats insoumis. Les candidats de la majorité se sont désistés dans 23 triangulaires les opposant au Rassemblement national et à la France insoumise. Ces retraits ont permis l’élection de 13 parlementaires insoumis. Tandis que 10 ont été finalement battus par le RN, en dépit du barrage républicain. Au total, la France insoumise a fait élire 72 députés.

La pratique du barrage républicain assez mitigée lors des duels LFI-RN

Là encore, on compte seulement une exception. Selon notre décompte, une seule candidate Ensemble s’est maintenue après être arrivée en 3e position derriere LFI et le RN. Il s’agit d’Emilie Chandler, dans la 1ere circonscription du Val-d’Oise, qui avait obtenu 25,46 % des voix au premier tour, derrière Anne Sicard (RN, 33,65 %) et Maximillien Jules-Arthur (LFI-NFP, 30,8 %). Au final, c’est le RN qui en a profité, devançant de moins de 500 voix (37,51 % contre 36,63 %) le candidat LFI-NFP.

Ces désistements presque systématiques, de part et d’autre, ont-ils été suivis d’effet auprès des électorats respectifs ? Du côté des électeurs d’Ensemble, la pratique du barrage républicain a été assez mitigée lors des duels LFI-RN. Ainsi, selon une étude d’Ipsos, moins de la moitié (43 %) des électeurs d’Ensemble au premier tour ont voté pour un candidat LFI lorsqu’il était face à un candidat RN ce dimanche 7 juillet. 19 % d’entre eux ont même voté pour le candidat d’extrême droite, quand 38 % se sont abstenus ou ont voté blanc. Quand le duel opposait le RN à un candidat PS, EE-LV ou PCF, les électeurs Ensemble ont voté pour ce dernier à 54 %.

Dans cette même étude, Ipsos notait qu’en cas de duel opposant le RN à Ensemble, 72 % des électeurs du Nouveau Front populaire se sont reportés en faveur d’un candidat macroniste. Mais les données enregistrées par Ipsos ne permettent pas de connaître le comportement d’un électeur se revendiquant de la France insoumise.