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Des photojournalistes travaillant pour l’AFP accompagnaient-ils le Hamas lors du massacre du 7 octobre ?

Des internautes accusent l’Agence France-Presse d’avoir employé des photoreporters palestiniens qui auraient été présents aux côtés du Hamas dès le début des attaques du 7 octobre. L’analyse des métadonnées des photographies invalide cette accusation.
Photo prise dans la bande de Gaza, à Khan Younès, à 10h31 le 7 octobre, par le photographie de l'AFP Saïd Khatib. (SAID KHATIB/AFP)
publié le 11 novembre 2023 à 7h21

Après les agences Associated Press (AP) et Reuters, c’est au tour de l’Agence France-Presse (AFP) d’être accusée d’avoir employé des photographes accompagnant le Hamas, le 7 octobre, sur des sites des attaques terroristes.

Alors que les principales accusations contre AP et Reuters avaient été formulées par une organisation pro-israélienne, Honest Reporting qui a fini par reconnaître qu’elle n’avait aucune preuve de ce qu’elle avançait les reproches contre l’AFP ont été émis par Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme (CAT) et enseignant à Sciences-Po Strasbourg. «Que fait votre photographe avec les terroristes du Hamas et du Jihad islamique le 7 octobre alors qu’ils “se dirigent vers la clôture frontalière avec Israel” et s’apprêtent à tuer 1 400 personnes dont 40 Français ? Etiez-vous au courant en avance ?» a-t-il demandé à l’AFP sur le réseau social X (ex-Twitter).

Dans un communiqué publié ce vendredi 10 novembre, le directeur de l’Information de l’AFP, Phil Chetwynd, a défendu le travail de ses journalistes à Gaza, signalant que «toute accusation de collusion entre nos journalistes à Gaza et le Hamas lors de l’attaque du 7 octobre est infamante et diffamatoire, et nous nous réservons le droit de prendre toute action en conséquence». Le directeur de l’information affirme que ses photographes «ont simplement suivi l’événement à mesure qu’il se déroulait sur le terrain».

L’AFP souligne que «trois photographes installés à Gaza, travaillant de façon permanente depuis plus de vingt ans pour l’AFP et reconnus internationalement, se sont mobilisés dès que l’attaque en cours du Hamas a été connue. Ils ont été réveillés par des tirs d’artillerie et de roquettes, et ils se sont rendus alors à proximité de la barrière entre Gaza et Israël. Chacun était identifié clairement comme journaliste, sur leur casque et leur gilet pare-balles. Les premières photos à proximité de la barrière de Gaza ont été réalisées plus d’une heure après le début de l’attaque».

Ces trois photographes sont Saïd Khatib, Mahmud Hams et Mohammed Abed. Grâce à ces noms, CheckNews a pu consulter les images qu’ils ont fournies durant la journée du 7 octobre, et analyser les métadonnées EXIF de ces documents, qui indiquent l’heure à laquelle chaque cliché a été réalisé.

Les premières photos prises par les trois photographes sont réalisées depuis des appartements, dans la bande de Gaza. Il s’agit de tirs de roquettes. Elle sont datées respectivement à 06 h 25 heure locale pour Mahmud Hams et à 06 h 33 heure locale pour Saïd Khatib. L’heure enregistrée par l’appareil de Mohammed Abed est incohérente, puisqu’elle correspondrait à 05 h 30 heure locale, pour les mêmes événements, trahissant une mauvaise configuration du boîtier (de fait, à 5 h 30, il faisait encore nuit, alors que le cliché montre les lueurs du soleil). Les trois photographes étaient donc en ville, côté Gaza, aux heures où le Hamas débutait ses assauts.

De ces trois photographes de l’AFP, un seul va franchir la frontière israélienne. Il s’agit de Saïd Khatib, qui va notamment prendre trois images d’un tank enflammé à 07 h 54, 07 h 55 et 07 h 57 (heure locale).

Une autre photographie de Saïd Khatib prise ce jour-là, et qui montre des hommes à bord d’un pick-up blanc, a été partagée sur les réseaux sociaux. Les métadonnées montrent que celle-ci a été prise à 10 h 31. La légende de cette photo indique qu’elle a été prise depuis la bande de Gaza, à Khan Younès. CheckNews n’a pas pu géolocaliser cette image faute d’éléments visuels identifiables. Cependant d’autres clichés pris par Saïd Khatib indiquent qu’il était de retour dans la bande de Gaza à 8 h 33 et 10 h 35. Soit après la photographie du tank incendié à la frontière israélienne.

Les photographies transmises aux agences de presse par Mahmud Hams et Mohammed Abed ce 7 octobre concernent exclusivement, quant à elles, des événements survenus dans la bande de Gaza qu’il s’agisse de Gazaouis se mettant à l’abri ou de dommages provoqués par des tirs israéliens.