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Est-il vrai que l’Unicef a refusé un don du groupe de métal sataniste Behemoth pour les enfants ukrainiens ?

Le groupe polonais a accusé Unicef Pologne d’avoir refusé un don de 2 200 euros pour soutenir les enfants victimes de la guerre en Ukraine, en raison de l’image du groupe. Ce que conteste le fonds.
Le groupe Behemoth en concert Pologne, en octobre 2022. (Krzysztof Zatycki/NurPhoto. AFP)
publié le 21 août 2023 à 16h20

Question posée par Paul-Emmanuel C. le 19 août

Vous nous interrogez sur une information relayée au début du mois d’août par de nombreux médias internationaux spécialisés dans la musique métal, parmi lesquels Metal Zone en France, affirmant que le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) a refusé un don du groupe de métal polonais Behemoth destiné aux enfants victimes de la guerre en Ukraine.

Cette décision aurait été prise «en raison de ce que le groupe représente». Formé en 1991, Behemoth est un groupe de musique, qui se revendique du satanisme dans ses interviews, et qui s’est fait connaître pour des faits de provocation religieuse. Son leader a notamment été poursuivi en Pologne pour avoir déchiré la Bible ou encore pour avoir piétiné une image de la Vierge Marie.

A l’origine de cette information, plusieurs publications du groupe de death métal sur les réseaux sociaux. La boutique en ligne de Behemoth a ainsi affirmé dans des messages que la branche polonaise de l’Unicef aurait refusé une donation d’environ 10 000 zlotys (environ 2 200 euros) provenant de la vente de peluches. En mai dernier, le groupe avait annoncé la vente d’«ours en peluche sataniques» sur son site, affirmant que les bénéfices seraient reversés à l’Unicef pour soutenir les enfants victimes de la guerre en Ukraine.

«Honte à vous»

Le 3 août, Behemoth a rendu public un échange de mails avec Unicef Pologne. L’Unicef Pologne y remercie le groupe pour son intérêt à participer au programme «Entreprise avec un cœur», mais indique : «Malheureusement, nous vous informons qu’en raison de la nature des messages accompagnant les produits vendus [par Behemoth], nous ne pouvons pas vous qualifier pour participer à ce programme particulier.»

«Honte à vous, @Unicef @Unicefpolska. Je suis sans voix. Etes-vous sûrs de vouloir aider les enfants ?» a réagi Nergal, le leader du groupe, dans des publications sur les réseaux sociaux, laissant transparaître sa déception face à ce refus. Finalement, le groupe a décidé de reverser l’argent récolté au «plus grand hôpital pour enfants» de Gdansk, ville d’origine du groupe.

«Parties sélectionnées de notre correspondance»

Les accusations de Behemoth ont suscité des critiques envers Unicef Pologne. Qui, en réponse à cette polémique, la publié un communiqué le 4 août, affirmant que contrairement à ce qu’ont écrit plusieurs médias, l’organisation «n’a pas rejeté le don de la boutique en ligne de Behemoth». Le porte-parole d’Unicef Pologne, Jan Bratkowski regrette que «que le représentant de [la boutique en ligne, ndlr], rendant toute l’affaire publique dans les médias sociaux, utilise des parties sélectionnées de notre correspondance et omette des fragments où, à sa propre demande, nous avons indiqué d’autres possibilités /manières de soutenir notre organisation». Le communiqué souligne que le groupe aurait pu faire un don en dehors du partenariat réservé aux entreprises et qu’Unicef «n’empêche personne – y compris la boutique en ligne de Behemoth – de faire un don pour nos activités statutaires ou de soutenir des domaines spécifiques de notre travail pour les enfants tels que l’éducation, la santé mentale ou la prévention de la crise climatique».

Selon les explications d’Unicef Pologne, le problème de la demande de Behemoth est qu’elle concernait le programme commercial «Entreprise avec un cœur», dont les partenariats «sont guidés par des normes clairement définies et doivent éviter toute référence politique ou idéologique». Dans son règlement, le programme cité stipule qu’Unicef Pologne «se réserve le droit de refuser la participation au programme des entreprises dont l’image, les produits et les méthodes de travail sont en conflit avec les valeurs professées par notre organisation». Le communiqué ne précise pas quels agissements précis de Behemoth, régulièrement poursuivi dans ce pays pour ses prises de positions anticatholique, vont à l’encontre des valeurs d’Unicef Pologne. Contacté par CheckNews, l’Unicef Pologne ne nous a pas répondu su ce point.