La photo des tirs iraniens sur Israël circule massivement depuis ce week-end. Et se veut une réponse aux déclarations de Téhéran qui justifie sa riposte par le bombardement de l’ambassade de la république islamique à Damas, le 1er avril. On y voit un bâtiment intact, présenté donc comme une ambassade iranienne en Syrie. Et à côté, un bâtiment effondré – celui qui a été ciblé – correspondant, selon la légende, à un bâtiment des Gardiens de la révolution. «Ce n’était pas une ambassade», commente une internaute très active de la sphère pro-israélienne.
It’s wasn’t an embassy.
— Aviva Klompas (@AvivaKlompas) April 16, 2024
It was the headquarters of an internationally designated terror group. pic.twitter.com/DcYdzwJExG
La circulation de cette image fait écho au débat, qui dure depuis quinze jours, concernant ce qu’a précisément ciblé l’armée israélienne le 1er avril, et s’il s’agit d’un bâtiment diplomatique disposant d’un statut particulier en droit international. La photo utilisée, prise par le photographe Firas Makdesi de Reuters le lendemain du tir, est réelle, et montre bien le lieu de la frappe.
Le bâtiment jouxtant l’immeuble principal de l’ambassade d’Iran à Damas a été rasé. La frappe, si Israël ne se l’est pas ouvertement attribuée, a fait l’objet d’une revendication à demi-mot : le porte-parole de Tsahal, Daniel Hagari, s’était ainsi permis de préciser à CNN au lendemain de la frappe que celle-ci avait visé «un bâtiment militaire des forces Al-Qods déguisé en bâtiment civil». Auprès du New York Times, des officiels israéliens ont par ailleurs confirmé sous couvert d’anonymat l’implication de l’Etat hébreu, tout en niant le statut diplomatique du bâtiment ciblé.
Poids symbolique indiscutable
La présence de Gardiens de la révolution dans le bâtiment est indiscutée, sept de ses membres dont plusieurs de ses commandants de hauts rangs ont été tués dans l’attaque, comme en attestent les hommages rendus officiellement en Iran. Parmi eux se trouvait le brigadier général Mohammad Reza Zahedi, le plus haut gradé des Pasdaran à être tué depuis la mort de Qassem Soleimani dans une frappe américaine en 2020. L’Observatoire syrien des droits humains, une ONG basée au Royaume-Uni, comptabilise en tout seize victimes, dont deux civils, les autres étant considérés comme des combattants ou des officiels militaires.
Depuis le début, l’Iran et son allié syrien réfutent la version israélienne. Le jour de la frappe, l’ambassade iranienne affirmait sur Twitter que le bâtiment bombardé faisait bien partie de l’ambassade, abritant une section consulaire ainsi que l’appartement de l’ambassadeur.
Une plaque encore accrochée à la grille du bâtiment détruit, visible dans des photos amateurs ou sur celles du photographe de l’AFP Louai Beshara, semble confirmer ce statut : on y voit écrit «section consulaire de l’ambassade de la république islamique d’Iran». Contredisant a priori ainsi les affirmations de l’armée israélienne et de ses relais.
Cela ne trancherait toutefois pas nécessairement la question de l’illégalité de la frappe, comme l’écrivait le New York Times dès le 2 avril. De nombreuses variables entrent en compte. Malgré son poids symbolique indiscutable, une ambassade n’aurait, d’après les spécialistes interrogés par le quotidien américain, pas de statut protecteur autre que celui de bâtiment civil, qui peut légalement être bombardé (dans un certain cadre, et avec certaines contraintes) s’il est utilisé à des fins militaires, ici par les Gardiens de la révolution. Tout en considérant que la frappe a eu lieu sur le sol syrien sans l’accord du pays, ce qui implique d’autres débats juridiques.