Question posée le 5 avril 2022.
Vous nous interrogez sur une déclaration du candidat Yannick Jadot ce 5 avril sur BFM TV et RMC : «Le rapport du Giec d’hier dit que les énergies renouvelables sont quatre fois plus efficaces pour lutter contre le dérèglement climatique que l’énergie nucléaire.»
Le dernier rapport du Giec constate qu’à l’échelle de la planète, le déploiement de certaines sources d’énergies, en remplacement d’autres, peut effectivement permettre de diminuer les émissions globales de gaz à effets de serre.
A la page 50 du «résumé pour les décideurs» du rapport, un graphique résume l’ampleur de la réduction qui peut être escomptée, d’ici à 2030 par rapport à l’année de référence 2019, en fonction de divers facteurs (facilité de déploiement de la solution, accessibilité pour les différentes nations, etc.). Attention, ce graphique traduit donc le fait que certaines énergies ont un potentiel de déploiement plus important que d’autres, et non que ces énergies sont «en soi» plus ou moins productrices de gaz à effet de serre.
Selon le graphique, il est envisageable qu’en 2030, l’éolien permette une réduction annuelle de près de 4 gigatonnes (Gt) d’équivalents CO2 à l’échelle du globe (avec une incertitude relative de l’ordre de 1,5 Gt). La contribution de l’énergie solaire avoisinerait les 4,5 Gt (plus ou moins 2,5 Gt). Dans les scénarios envisagés par le Giec, le déploiement du nucléaire d’ici à 2030 permettrait, lui, une diminution d’environ 1 Gt d’équivalents CO2 (plus ou moins 0,5 Gt). L’ordre de grandeur de cette contribution est équivalent à celui de deux autres énergies renouvelables : l’énergie géothermale d’une part, et l’exploitation de la biomasse d’autre part (émettrice de CO2, mais moins que les énergies auxquelles elle se substitue).
Les auteurs du rapport précisent que cette évaluation «s’appuie sur environ 175 sources qui, ensemble, donnent une représentation équitable des potentiels de réduction des émissions dans toutes les régions [du monde]».
Selon le Giec, l’essentiel du coût de l’énergie éolien et solaire venant en remplacement d’énergies émettrices de CO2 se fera à un coût inférieur. A l’inverse, l’énergie nucléaire coûtera en moyenne un peu plus cher que l’énergie à laquelle elle se substitue. L’estimation prend en compte les coûts liés au stockage des déchets radioactifs sur le long terme.
Le graphique est accompagné d’une mention selon laquelle «de nombreuses options aujourd’hui disponibles dans tous les secteurs sont estimées comme offrant un potentiel substantiel de réduction des émissions nettes d’ici à 2030. Les coûts et potentiels relatifs varieront selon les pays, et sur le long terme comparé à 2030».
«Investir dans les renouvelables en France»
De fait, il est à noter que la déclaration de Yannick Jadot sur BFMTV prolonge un propos sur la situation française, alors que le constat du Giec est réalisé à l’échelle mondiale. L’intervention, remise dans son contexte, est la suivante : «On a un parc nucléaire qui est vieillissant, aujourd’hui. Donc mettons le paquet, un, sur la réduction de la consommation. C’est bon pour le pouvoir d’achat, c’est la santé des ménages. Vous avez douze millions de Français qui aujourd’hui ne se chauffent pas convenablement. Donc c’est aider ces Français, c’est aider tous les Français. Et on déploie les énergies renouvelables. Le rapport du Giec d’hier dit que les énergies renouvelables sont quatre fois plus efficaces pour lutter contre le dérèglement climatique que l’énergie nucléaire.»
Toutefois, le rapport du Giec ne permet pas d’estimer dans quelle mesure la poursuite du déploiement des énergies renouvelables peut contribuer à la diminution des émissions de CO2 du pays. En France, plus de 70% de la production d’électricité repose actuellement sur le nucléaire, énergie considérée comme décarbonée.
Interrogée par CheckNews, l’équipe de campagne de Yannick Jadot confirme que la dernière partie de ce propos, comme l’analyse du Giec auquel il renvoie, concerne bien «l’échelle mondiale». «Mais réduire la consommation d’énergie et déployer les énergies renouvelables est aussi l’option la plus rapide et la moins chère (donc la plus efficace), d’ici à 2030, pour la France», précise-t-elle. «Il est vrai que la production électrique en France est faiblement carbonée. Mais l’énergie la plus consommée en France, ce sont des énergies fossiles (64% de la consommation finale), et il faut en sortir de toute d’urgence. D’autre part, lorsque le parc nucléaire est en partie arrêté comme actuellement, l’électricité elle-même redevient plus carbonée puisqu’on importe (hier à 6h30, par exemple, on importait 10 350 MW). La position de Yannick Jadot est donc bien qu’il faut investir dans les économies d’énergie et dans les renouvelables en France.»