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Le jeune député Nupes Louis Boyard a-t-il vraiment refusé de serrer la main des élus RN?

Le jeune élu a suscité la polémique en refusant la main tendue par le député RN Philippe Ballard... mais a tout de même serré la main de 26 élus du RN.
Le député Louis Boyard (LFI-Nupes) devant l'Assemblée nationale, le 21 juin. (Albert Facelly/Libération)
publié le 30 juin 2022 à 17h54

Vous nous avez interrogés sur l’attitude du jeune député Nupes Louis Boyard, qui s’est vanté sur twitter d’avoir refusé de serrer la main des représentants du Front national, en invoquant un «geste barrière» face à la «pandémie de racisme, d’antisémitisme, d’islamophobie». Tout est parti, lors du premier tour de l’élection de la présidence de l’Assemblée nationale, par le refus du jeune député de la Nupes Louis Boyard de prendre la main que lui tendait le député RN Philippe Ballard.

De quoi provoquer une polémique et les interrogations des journalistes lui demandant de justifier son geste. L’ancien président du syndicat lycéen UNL, désormais parlementaire du Val-de-Marne, leur a alors expliqué que «vous êtes nombreux à savoir qu’actuellement nous sommes dans un contexte de pandémie, et que donc il faut prendre ses précautions. Une pandémie de racisme, d’antisémitisme, d’islamophobie et que donc dans l’intérêt de la santé de tous, j’appelle les Français et tout particulièrement le président de la République et ses amis à ne pas serrer la main au Rassemblement national. Et j’ai aussi une question à poser, comment est-ce que ça se fait que ce qui était anormal il y a vingt ans est normal aujourd’hui ? Où sont les hommes et femmes d’Etat qui comme Jacques Chirac et Simone Veil disaient «Ne composez jamais ni avec le racisme, ni avec l’antisémitisme» ? Où sont les journalistes qui avaient du recul et de la mesure par rapport à la percée de l’extrême droite ? Pourquoi ce qui était anormal il y a vingt ans est devenu normal aujourd’hui ? De mon point de vue, je reste fidèle aux principes : face au Rassemblement national, on respecte les gestes barrières.»

Le jeune élu de 21 ans a-t-il bien respecté le geste barrière qu’il promeut ? Plutôt pas, en fait. Lors de l’élection de la présidence de l’Assemblée nationale, Louis Boyard s’est trouvé à la tribune de l’Assemblée nationale, puisque avec l’élu polynésien Tematai Le Gayic, aussi âgé de 21 ans, ils étaient chargés de veiller au bon déroulement du vote en se tenant à côté des urnes. Les deux benjamins du Palais-Bourbon ont donc vu défiler les députés par ordre alphabétique. Durant ce scrutin, les députés ont le plus souvent salué les deux jeunes hommes, souvent en leur serrant la main.

26 mains serrées de députés du Rassemblement national

CheckNews a revu les images du vote. Parmi les 577 noms qui ont été cités, Louis Boyard a assisté aux votes allant de Katiana Levavasseur (RN) jusqu’à Jean-Marc Zulesi, à la fin de l’alphabet, puis de la lettre A, comme Damien Abad (Renaissance) à Christian Baptiste (PS).

Parmi les 271 élus passés devant lui, 39 faisaient partis du Rassemblement national. Louis Boyard a serré la main à 26 d’entre eux. Pour les cas restants, les élus ont le plus souvent salué le benjamin d’un simple signe de la tête. Seule la main tendue par Philippe Ballard est réellement restée en l’air.

Si c’était à refaire… il ne serrerait la main d’aucun élu RN

Joint par CheckNews, Louis Boyard explique que l’idée de refuser de serrer la main des représentants du Rassemblement national lui est venue alors qu’il se trouvait auprès des urnes : «alors que le vote suit son cours, je salue chaque député lorsqu’il se présente devant l’urne dans le respect du protocole et sans avoir anticipé la situation. Mais une pensée tourne en boucle dans ma tête en réalisant que je suis en train de saluer comme si de rien n’était des députés du Rassemblement national (que je ne connais pas forcément tous) : Pourquoi est-ce que ce qui était choquant hier semble acceptable aujourd’hui ? Pourquoi est ce que leur présence ne suscite pas plus d’indignation ?»

C’est alors que le député Philippe Ballard se présente devant lui. «Je reconnais le porte-parole du Rassemblement national et je décide de ne pas lui serrer la main. Pas une attaque personnelle mais un acte politique pour marquer mon indignation et ouvrir un débat sur le rapport au RN. Un cri d’alerte pour dénoncer la dédiabolisation du parti fondé par Jean-Marie Le Pen».

Le jeune élu Nupes assure que si c’était à refaire, il refuserait la main tendue aux autres parlementaires du Rassemblement national.