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Le NPA a-t-il été condamné pour «apologie du terrorisme», comme l’affirme Bruno Le Maire ?

Le ministre de l’Economie dénonçait la présence du parti anticapitaliste au sein du Nouveau Front populaire.
Au meeting de Philippe Poutou à Carcassonne, mardi 18 juin. (Ludo Charles /Hans Lucas. AFP)
publié le 20 juin 2024 à 19h26

Invité de la matinale de CNews et d’Europe 1 ce jeudi 20 juin, Bruno Le Maire a critiqué l’engagement de François Hollande, candidat en Corrèze sous la bannière du Front populaire, en ciblant l’un des partis de l’alliance des gauches, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). Le ministre de l’Economie et des Finances affirme ainsi : «Les valeurs, c’est essentiel. Vous ne pouvez pas être ancien président de la République, avoir fait défiler dans les rues de Paris pour dire “Je suis Charlie”, vous être opposé à la montée de l’antisémitisme, la montée de l’islam radical dans notre pays, et puis faire alliance avec un parti, le NPA, qui a été condamné pour apologie du terrorisme. Enfin, où sont les valeurs dans cette campagne politique ?»

Des propos qui ont suscité une vive réaction du porte-parole du NPA, Philippe Poutou, sur X (anciennement Twitter) : «Quel gros menteur Bruno Le Maire. Non, le NPA n’a jamais été condamné pour apologie du terrorisme.»

Interrogée par CheckNews, la communication de Bruno Le Maire a – de facto – corrigé l’affirmation du ministre, sans se formaliser outre mesure de son imprécision : «Aucun commentaire, mais si vous voulez faire un article pour rappeler que le NPA est poursuivi pour apologie du terrorisme, je vous laisse faire.»

De fait, le NPA est aujourd’hui l’objet d’une plainte pour apologie du terrorisme, mais il est prématuré de parler de condamnation.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait affirmé le 10 octobre sur le plateau de Quotidien qu’une enquête avait été ouverte contre le NPA. En cause : le communiqué diffusé par le NPA le 7 octobre, quelques heures après le début de l’attaque du Hamas sur le territoire israélien où plus de 1 200 personnes, dont près de 800 civils, ont été tuées. Le texte plaçait notamment l’«offensive» «du côté de la résistance». Dans un autre communiqué, deux jours plus tard, le NPA évoquait l’«amplification de la lutte pour les droits du peuple palestinien» et expliquait que les «événements autour de l’offensive de Gaza» «ne peuvent s’apprécier qu’à la lumière de la situation dramatique du peuple palestinien». Tout en déplorant «toutes les victimes civiles, qu’elles soient israéliennes ou palestiniennes, et nous dénonçons tous les crimes de guerre».

«Aucune audience n’est à ce jour prévue»

Philippe Poutou, porte-parole du NPA, précise à CheckNews : «Notre directeur de publication avait été convoqué en novembre pour un interrogatoire de une heure et demie, de mémoire, qui s’était passé très correctement, sans pression, sans menace. Depuis strictement rien, ni le NPA, ni moi, ni aucun camarade n’ont reçu quoi que ce soit.» Interrogé par CheckNews, le parquet de Paris indique «qu’aucune audience n’est à ce jour prévue». Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y en aura pas.

Après le 7 octobre, des dizaines de plainte pour apologie du terrorisme avaient été déposées, émanant d’hommes et des femmes politiques, de simples citoyens, ou d’organisations juives.

Outre le NPA, plusieurs personnalités de gauche ont fait l’objet de plaintes similaires. Au sein de La France insoumise, Mathilde Panot et Rima Hassan ont aussi été la cible de plaintes, et entendues par la police en avril. Des plaintes ont également été déposées contre Danièle Obono et David Guiraud. Contactés par CheckNews, les deux députés expliquent n’avoir reçu aucune convocation à ce jour.

Les convocations ne présagent pas des suites données, ni évidemment de la culpabilité de la personne entendue par la police. Elles interviennent dans le cadre d’une enquête dirigée par un magistrat, lequel peut ensuite décider de poursuivre (ou non) la personne. Si c’est le cas, il peut notamment la renvoyer en procès.

Dans d’autres procédures, où des procès ont eu lieu, le secrétaire général de la CGT du Nord a été condamné en avril à un an de prison avec sursis et à verser 5 000 euros à l’Organisation juive européenne pour préjudice moral pour apologie du terrorisme. Une condamnation motivée par un communiqué diffusé le 10 octobre dans lequel le syndicaliste écrivait que «les horreurs de l’occupation illégale se sont accumulées. Depuis samedi [7 octobre], elles reçoivent les réponses qu’elles ont provoquées». Le tribunal a estimé que la communication de la CGT du Nord incitait à «amoindrir la réprobation morale» du 7 octobre sans condamner l’attaque. Le syndicaliste a fait appel.

Dans une autre affaire, un homme franco-turc de 25 ans, jugé en mars à Alençon (Orne) pour avoir partagé une vidéo d’un camp d’entraînement du Hamas avec le texte «c’est ce qui vous attend quand vous entrez à Gaza», avait été relaxé.