Menu
Libération
CheckNews
Vos questions, nos réponses
Législatives anticipées

Les statuts du parti Les Républicains permettent-ils de «virer» son président, Eric Ciotti ?

L’exclusion d’un membre, y compris du président du mouvement, peut théoriquement être à l’ordre du jour du bureau politique du parti. Dans la soirée de mardi, la secrétaire générale du parti a demandé la convocation dudit bureau, dans des conditions que Ciotti juge contrevenir aux statuts.
Eric Ciotti, à Valence, le 30 septembre . (Albert Facelly/Libération)
publié le 11 juin 2024 à 17h38

«On le vire.» Interrogée sur France Info quant au sort qu’elle entendait réserver à Eric Ciotti, président de LR, après l’annonce de son ralliement au RN, la vice-présidente du parti Florence Portelli a été on ne peut plus claire. D’autres cadres et figures de LR, comme le président du Sénat, Gérard Larcher, ont également estimé qu’Eric Ciotti avait franchi la ligne rouge et ne pouvait plus présider le mouvement. Au-delà d’une démission volontaire du président, celui-ci peut-il être poussé vers la sortie ? «On va éplucher les statuts de ce parti», a répondu Florence Portelli lors de son interview.

Ni les statuts ni le règlement intérieur du parti Les Républicains ne prévoient explicitement le cas d’une destitution de son président. Néanmoins, selon ces deux textes (respectivement leurs articles 24 et 23), si un quart des membres du conseil national du parti en fait la demande, le bureau politique peut être réuni afin de traiter d’un point précis. L’exclusion d’un membre, y compris du président du mouvement, ou sa destitution, peut théoriquement être à l’ordre du jour.

Un petit détail qui a son importance a rapidement sauté aux yeux de certains journalistes : en temps normal, la demande doit être adressée au président du mouvement, et la réunion doit se tenir «au plus tard huit jours après réception de la demande». Dans l’hypothèse où une telle demande était adressée et reçue le mercredi 12 juin, la réunion pourrait ne pas se tenir avant le 20 juin. Et ce, alors que les listes des candidats aux législatives doivent être constituées et déposées en préfecture avant le 16 juin à 18 heures.

Ciotti « empêché » ?

Toutefois, dans la soirée de mardi, suite à une réunion entre élus et cadres, un député LR expliquait à Libération qu’une autre piste était envisagée. «L’article 25-5 alinéa 2 prévoit l’empêchement du président», relève-t-il. Plus exactement, le texte énonce que « en cas d’empêchement, le Président du Mouvement est remplacé par le Vice-président délégué ; il en est de même en cas de vacance de la présidence du Mouvement jusqu’à l’élection d’un nouveau Président. » Dès lors, tout serait question d’interprétation. Puisque presque personne, dans son parti, ne suit Ciotti, il serait dans l’incapacité pratique de remplir ses fonctions. Selon le Parisien, des salariés du parti auraient même décidé de «l’empêcher de travailler», le président n’ayant «plus la main sur son mail ni sur les réseaux sociaux». Ciotti ainsi «empêché» dans son action, l’article 25 pourrait donc simplifier les choses pour ceux qui souhaitent le voir partir.

Dans la soirée de mardi, Annie Genevard, secrétaire générale du parti, a convoqué un Bureau Politique exceptionnel à 15 heures, avec, pour ordre du jour, un vote sur le sort de Ciotti.

Toutefois, dans un communiqué diffusé dans la matinée du 12 juin, « les Républicains » (comprendre : sa présidence) annoncent « réfuter » la tenue d’un bureau politique. Celui-ci, explique le texte, « ne répond pas aux exigences démocratiques de nos statuts et de notre règlement intérieur ». Et de rappeler les dispositions des articles 24 et 23 évoqués plus haut, avant de conclure : « le Bureau Politique convoqué ce jour ne respecte aucune de ces deux procédures, et a donc été mis en œuvre en violation flagrante de nos statuts. Il n’a aucune valeur juridique. »

Auprès de CheckNews, Annie Genevard maintient sa position : « La situation exige la tenue de ce bureau politique ».

En février 2023, dans le contexte des débats sur la réforme des retraites, Eric Ciotti avait démis Aurélien Pradié de ses fonctions de vice-président exécutif, arguant que «ses prises de position répétées n’étant plus conformes avec les valeurs de cohérence, d’unité et de rassemblement qui doivent guider la droite républicaine».

[mise à jour du 12/06/24 à 10h15, 11h00 et 12h00 : ajout du possible recours à l’article 25-2, de l’annonce de la convocation d’un BP par Annie Genevard, la mention du communiqué publié en réponse, et la réponse de la secrétaire générale]