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Mikhaïl Gorbatchev s’est-il exprimé sur la guerre en Ukraine?

Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
Le dernier dirigeant de l’URSS avait soutenu l’annexion de la Crimée en 2014.
Mikhaïl Gorbatchev lors de la parade militaire russe célébrant la victoire de 1945, à Moscou en 2018. (Grigoriy Sisoev/Sputnik. AFP)
publié le 8 avril 2022 à 12h01
Question posée par Jean-Louis le 6 avril

Bonjour,

Le 2 mars, une semaine après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Vladimir Poutine souhaitait un joyeux anniversaire à son prédécesseur et dernier dirigeant de l’URSS, Mikhaïl Gorbatchev, 91 ans, sur le site du Kremlin : «Vous avez vécu une vie longue et mouvementée. Vous avez reçu de droit une grande autorité et une grande reconnaissance.» Vous nous interrogez sur la position publique, si position a été prise, de Gorbatchev sur la guerre en Ukraine.

Mikhaïl Gorbatchev ne s’est pas exprimé depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février. Sa dernière prise de parole date du 24 décembre 2021, à l’occasion du trentième anniversaire de la fin de l’Union soviétique. Alors que les tensions étaient déjà élevées entre les pays occidentaux et la Russie, l’ancien dirigeant dénonçait «l’arrogance» et le «triomphalisme» des Etats-Unis, dans une interview donnée à l’agence de presse RIA Novosti. «Ça leur est monté à la tête, l’arrogance, l’autosatisfaction, ils se sont proclamés vainqueurs dans la guerre froide alors qu’on avait ensemble sauvé le monde de la confrontation», fustigeait-il. Il saluait cependant les pourparlers organisés en janvier, après que Washington et Bruxelles ont accusé Moscou d’avoir rassemblé des troupes aux frontières de l’Ukraine.

Son ancien interprète Pavel Palazhchenko s’est exprimé sur les récents événements, évoquant la position de l’ancien chef d’Etat. A quelques jours du lancement de l’offensive russe, il déclarait dans une interview à Fox News : «[Mikhaïl Gorbatchev] a toujours prévenu que des choses qui pourraient être très dangereuses pourraient se produire entre la Russie et l’Ukraine. Mais il a toujours fait ce qu’il pouvait pour rapprocher ces deux nations plutôt que de voir continuer de se creuser le fossé que nous voyons maintenant s’élargir. Donc pour lui, émotionnellement, c’est tragique.»

Mikhaïl Gorbatchev a dirigé l’Union soviétique entre 1985 et 1991, date à laquelle il démissionne et met fin à l’URSS par la même occasion. Durant cette période, il mène de nombreuses réformes économiques et sociales, connues sous le nom de «Perestroïka», qui ont conduit à un apaisement progressif des tensions avec l’Occident.

Soutien à l’annexion de la Crimée

Depuis, Gorbatchev a continué de s’exprimer sur la géopolitique internationale et la politique de son pays. Entre le Prix Nobel de la paix de 1990 et Vladimir Poutine, les relations ont d’abord été compliquées. En 2009, dans une interview à l’agence de presse Associated Press, Gorbatchev comparait le parti de l’actuel chef d’Etat, Russie unie, à une «version pire du parti communiste de l’Union soviétique» et décrivait un parti «de bureaucrates».

En 2014, lorsque les séparatistes prorusses ont envahi la péninsule de Crimée en Ukraine, il avait néanmoins défendu la position de son pays et dénoncé une ingérence américaine. «Je prendrai fermement la défense de la Russie et la défense de son président, Vladimir Poutine», soutenait-il en novembre 2014, alors qu’il commémorait les 25 ans de la chute du Mur de Berlin, en Allemagne. «Je suis absolument convaincu que Poutine défend aujourd’hui mieux que quiconque les intérêts de la Russie, déclarait-il auprès de l’agence de presse russe Interfax. Il y a bien sûr dans sa politique de quoi attirer les critiques. Mais je ne souhaite pas le faire et je ne veux pas que quelqu’un d’autre le fasse.»

Gorbatchev déplorait également les sanctions occidentales, dénonçant le début d’une nouvelle guerre froide. «Pour dire franchement les choses, [l’Amérique] nous entraîne dans une nouvelle guerre froide. […] Je ne suis pas en mesure de déclarer avec assurance que la guerre froide ne va pas tourner à une véritable guerre», s’exprimait-il en 2015, toujours via Interfax.

Deux ans plus tard, en 2016, les services de sécurité ukrainiens lui interdisaient l’entrée sur le territoire pour une durée de cinq ans. En cause, son soutien à l’annexion de la Crimée. «Je suis toujours favorable à la libre volonté du peuple et la majorité des habitants de Crimée voulaient être réunis avec la Russie», estimait-il dans les colonnes du Sunday Times, quelques jours avant la décision ukrainienne.