Alors que le bilan humain ne cesse de s’alourdir – au moins 900 morts recensés à cette heure côté israélien, auxquels s’ajoutent 150 otages emmenés par les miliciens du Hamas lors de leur infiltration initiale –, l’inquiétude se renforce autour du sort des ressortissants français présents sur le sol israélien. D’après les informations confirmées à ce stade par les autorités, l’attaque menée par le Hamas en Israël a fait au moins huit morts côté français, alors que vingt personnes sont toujours portées disparues.
Comme l’a rappelé le ministère des Affaires étrangères, autour de 87 000 ressortissants français – enregistrés auprès des consulats de Tel-Aviv et Jérusalem – vivent en Israël. Auxquels il faut ajouter les «nombreux Français» qui étaient «de passage» dans le pays, en vacances notamment, au moment où l’assaut a été lancé.
Huit Français décédés
«J’ai la grande tristesse de devoir vous informer qu’à cette heure, nous déplorons le décès de huit compatriotes dans ces attaques terroristes et nous sommes sans nouvelles de 20 disparus», a annoncé mardi 10 octobre la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, prévenant que ce bilan risquait de s’alourdir.
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Peu d’informations ont filtré quant à l’identité des victimes. Mardi sur le plateau de CNews, Meyer Habib, député de la 8e circonscription des Français de l’étranger (qui inclut Israël et les Territoires palestiniens), avait déclaré : «J’ai longuement eu le papa de la [troisième] victime [au téléphone]», a rapporté l’élu, ajoutant : «A l’heure où je vous parle, je ne peux pas vous donner plus de détails, parce que certains membres de la famille en France ne sont pas encore au courant. On va les prévenir ce matin.» Egalement de passage sur RTL, Meyer Habib a uniquement indiqué que cette victime, dont il a été le premier a annoncé le décès, est «une personne jeune».
Meyer Habib avait également fait part sur les réseaux sociaux de la mort d’un quatrième français, du nom d’Avidan T. Dans un premier temps, dimanche, l’élu avait tweeté qu’«un français de 26 ans, Avidan T, originaire de Bordeaux, a sans doute été enlevé dans le sud d’Israël par le Hamas alors qu’il participait au festival de musique» techno Tribe of Nova, qui se déroulait près de la frontière avec Gaza et a viré au massacre. Puis avait indiqué lundi que «ce jeune Français originaire de Bordeaux [était] bien pris en otage par ces barbares du Hamas», comme le lui avait confirmé «son père, médecin». Le décès d’Avidan T. a également été annoncé par le Consistoire de Bordeaux.
Regardez la photo de ce magnifique jeune homme. C’est Avidan, ce Français né à Bordeaux en 1997. Il a été massacré par le Hamas.
— Meyer Habib (@Meyer_Habib) October 10, 2023
Son père, mon ami Mikhael, est effondré.
C’est le quatrième Français tué, quinze autre au moins sont portés disparus parmi les milliers de victimes… pic.twitter.com/xtbCDqe7jd
Sur les autres victimes françaises, très peu d’informations ont été communiquées. On sait que la première, dont le décès a été annoncé dimanche, est de sexe féminin – le Quai d’Orsay mentionnant «une compatriote». Selon les informations communiquées lundi à franceinfo par Meyer Habib, ces deux personnes ont été tuées alors qu’elles participaient au festival techno – le bilan y est particulièrement élevé puisque les corps d’au moins 260 festivaliers auraient été retrouvés, selon les secours. Les indications de Meyer Habib n’ont pas depuis été confirmées par le ministère des Affaires étrangères.
Parmi les défunts, pourrait figurer un Français engagé au sein des Forces de défense israéliennes. Le journaliste israélien Jonathan Serero (ancien d’I24News) indiquait dans une publication postée lundi sur X (ex-Twitter) que «le soldat franco-israélien Binyamin Loeb, membre de la communauté Habad d’Yerres [commune d’Essonne, ndlr], est tombé au combat alors qu’il tentait de sauver la vie à ses compagnons d’armes».
Sollicité par l’AFP, le Parquet antiterroriste français, compétent en matière de crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis contre des Français à l’étranger, a indiqué lundi être «en lien avec le Quai d’Orsay». L’objectif, a-t-il précisé, «est d’obtenir des informations sur les victimes et les circonstances de leur décès pour décider de l’ouverture ou non d’une ou plusieurs enquêtes et définir la ou les qualifications qui pourraient être données aux faits».
Au moins vingt Français portés disparus
Comme l’a annoncé la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, le nombre de Français disparus est désormais de 20. Le quai d’Orsay avait précisé lundi que le dispositif de crise mis en place par la France «a été en contact avec plusieurs dizaines de compatriotes cherchant notamment à localiser leurs proches, Français résidents ou de passage en Israël».
Dans un point presse mardi, le Quai d’Orsay avait indiqué qu’il ne donnerait pas davantage «d’information sur les identités» des Français disparus. Parmi ceux dont l’enlèvement est «très probable», figure «un enfant mineur de 12 ans», a quand même révélé le ministère des Affaires étrangères. Il s’agirait d’Eitan Y., un Franco-Israélien. Le jeune garçon vit avec sa famille dans le kibboutz de Nir Oz, situé au sud d’Israël, à seulement quelques centaines de mètres de la bande de Gaza. Selon sa tante Ayala Yahalomi, Eitan a été enlevé samedi à moto par des terroristes du Hamas. Son père, Ohad, serait lui aussi porté disparu, d’après la publication que celle-ci a partagée sur Facebook. Contactée lundi par le Parisien, Ayala Yahalomi affirme qu’Eitan a bien «la citoyenneté française», comme sa mère Batsheva et une de ses deux petites sœurs.
Samedi, vers 9 heures, Eitan et ses parents «ont entendu des tirs sur leur maison», a relaté sur I24News Esther, la grand-mère, précisant que la famille s’est réfugiée dans un abri. «Mon fils retenait la porte la pièce blindée pour que les terroristes ne s’en prennent pas aux enfants.» Mais les hommes armés du Hamas sont quand même parvenus à rentrer. D’après la suite du récit exposé par la tante Ayala Yahalomi, tandis que le père est blessé par un tir de kalachnikov, le reste de la famille est pris en otage : «Ils les ont mis sur des motos, ma belle-sœur et ses deux filles sur l’une et sur l’autre Eitan.» Dans la foulée, «ils les ont conduits à 200 ou 300 mètres puis deux chars sont arrivés. La première moto s’est arrêtée, mais pas la deuxième, avec Eitan». Selon elle, seules la mère et les deux petites filles ont pu prendre la fuite. Lundi soir, Ayala Yahalomi affirmait ne toujours pas disposer de «la moindre nouvelle» de son neveu et de son frère.
2 remain from a family of 5 after Hamas terrorists infiltrate their home on Saturday
— i24NEWS English (@i24NEWS_EN) October 9, 2023
'Batsheva told the little child, please we will get on the ground and you will pretended your dead' Ayala Yahalomi Luzon, sister of missing Ohad and his son Eitan from Kibbutz Nir Oz shares pic.twitter.com/NDDOsbErpV
Mardi matin, le député Meyer Habib suggérait sur RTL qu’Eitan se trouve actuellement «entre les mains sans doute du Hamas». Outre le jeune garçon, au moins deux Français restant introuvables pourraient faire partie des festivaliers enlevés autour du site où était organisé le festival Tribe of Nova, d’après les témoignages de leurs proches.
Une Franco-Israélienne de 32 ans, Céline Ben David Nagar, a disparu au niveau de Mefalsim, un kibboutz à proximité de la bande de Gaza, alors qu’elle était en voiture après avoir fui le festival. Cette responsable d’un cabinet d’avocat, mariée, mère d’un bébé de 6 mois, est arrivée en Israël à l’âge de 13 ans, a précisé l’une de ses amies à France Inter. Cette amie a ensuite exprimé ses craintes : «J’espère qu’elle est cachée quelque part, en sécurité, mais ça ne colle pas.»
Son époux, Idor Nagar, a témoigné sur BFM TV, leur petite-fille assise sur ses genoux, et a raconté : «Le dernier message que Céline a envoyé [à 7 h 15], c’est «les soldats arrivent» […] Comme elle n’a plus donné de nouvelles depuis, on pense que ces fameux soldats n’étaient pas des soldats israéliens, mais des terroristes». Idor Nagar explique avoir pu géolocaliser sa voiture, s’être rendu sur place, et avoir alors trouvé son «véhicule criblé de balles. On n’a pas retrouvé beaucoup de traces de sang, c’est ce qui permet de supposer que Céline est encore en vie». «A-t-elle été prise en otage ? Tuée ?» interroge-t-il. «On a retrouvé la voiture avec à peu près quatre impacts de balles», a confirmé le frère de la jeune femme sur RTL. «Peut-être que ma sœur a réussi à se sauver quelque part», espère-t-il.
Enfin, un jeune homme franco-israélien de 25 ans, originaire de Marseille, et dont la famille avait quitté la ville pour Israël il y a une vingtaine d’années, ferait partie des otages, a rapporté France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur. «On ne sait pas ce qui est advenu de lui. Je vous laisse mesurer l’angoisse des parents qui n’ont aucune information à son sujet», témoigne un cousin de son père. Le Consistoire israélite de Marseille a déclaré auprès de France 3 recevoir des informations «au compte-gouttes» au sujet de ce jeune homme et ne pas pouvoir communiquer à ce stade.