Ce 3 octobre, la journaliste lettone Evita Purina, rattachée au service de vérification des faits du média Re : Baltica, a porté à notre attention une capture d’écran provenant apparemment du site de Libération, dans lequel on peut lire : «Les parasitologues estiment que l’épidémie de punaises de lit à Paris est liée à l’afflux de réfugiés ukrainiens dans la capitale.» D’autres textes analogues apparaissent sous la bannière de titres de presse français tels que le Figaro ou Contrepoints. Comme le suspectait notre consœur, ces captures d’écrans sont des faux.
Ironiquement, les colonnes de Libération dénonçaient à l’inverse, fin septembre, «l’écœurant fantasme» d’un Pascal Praud suggérant un lien entre punaises de lit et immigration.
Evita Purina nous précise que les captures d’écran qu’elle a portées à notre connaissance sont partagées sur divers canaux de communication russes. Mais pas seulement. «Nous avons remarqué pour la première fois ce contenu lorsque l’un des députés municipaux de Daugavpils (deuxième ville de Lettonie, proche des frontières biélorusse et russe, la majorité absolue de la population y est russophone) a partagé ce faux sur son compte Facebook.» Le député en question, Mihail Lavrenov, a depuis supprimé le message.
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Selon le service «Re : Check» de Re : Baltica, ce faux contenu de Libération a initialement été publié par plusieurs chaînes Telegram pro-russes, parmi lesquelles celle d’Ukraina.ru, un site rattaché au groupe média Russia Today. Evita Purina note que la source d’Ukraina.ru «est qu’un profil Telegram anonyme, Cheikh Tamir». Le texte partagé par Mikhail Lavrenov sur son compte Facebook serait pour sa part tiré d’un site du nom de RF-SMI qui, à la connaissance de nos confrères lettons, n’appartient pas à l’Etat russe.
Depuis juillet, Libération (comme plusieurs autres médias français) est régulièrement victime de tels détournements. Attribuée à des acteurs russes par Viginum (le service de l’Etat chargé de détecter les ingérences numériques étrangères), la campagne «Doppelgänger» consiste à mettre en ligne de faux sites usurpant l’identité graphique de grands titres de presse (le Monde, le Figaro, la Croix, le Point ou encore le Parisien). Les contenus publiés ont essentiellement, mais pas exclusivement, trait à la guerre en Ukraine. Comme nous l’écrivions en septembre 2022, de fausses «une» de Charlie Hebdo, favorables au régime russe ou défavorables à l’Ukraine, sont également en circulation.