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Où en est la «commission d’enquête populaire» sur les Jeux olympiques et paralympiques lancée par LFI ?

JO Paris 2024dossier
Le groupe parlementaire insoumis a lancé une commission officieuse pour examiner les implications sociales, économiques et écologiques des Jeux de Paris 2024. Ses auditions ont commencé le 27 août et devraient se traduire par un rapport au début du mois d’octobre.
Les anneaux olympiques sur la tour Eiffel. (Serge Attal/Only France via AFP)
publié le 10 septembre 2024 à 21h20

Le 25 juillet, veille de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, le groupe parlementaire de La France insoumise dégaine un communiqué de presse pour annoncer la mise en place d’une «commission d’enquête populaire sur les implications sociales, économiques et écologiques des Jeux olympiques et paralympiques 2024».

Dénonçant la consécration du «sport business» qu’effectuerait le CIO et l’exacerbation des «dérives de la politique d’Emmanuel Macron», le groupe insoumis promet que sa commission «rendra ses conclusions à la rentrée parlementaire, au terme d’un processus d’auditions, de rencontres et de visites de terrain qui dureront tout l’été, jusqu’à la fin des Jeux paralympiques, le 8 septembre».

Alors que les Jeux ont été largement perçus comme un succès et un moment d’enthousiasme, au regard du bon déroulement des épreuves et de la réussite sportive des athlètes français, certains commentateurs ont ironisé sur le déroulé de cette commission insoumise. Parmi eux, l’ancien ministre d’Emmanuel Macron, Clément Beaune a lancé cette pique sur X le 4 août en plein JO : «Avec tout ça, on n’a plus de nouvelles de la commission d’enquête “populaire” JO Paris 2024 de LFI ! On attend avec impatience les auditions de Teddy Riner et Léon Marchand, pour mieux comprendre cet échec.»

A présent que la deadline des Jeux paralympiques, fixée par LFI dans son communiqué est terminée, d’autres commentateurs, comme l’ancien journaliste Hubert Huertas, qui exprime souvent son hostilité vis-à-vis de LFI sur le réseau social X, a taquiné la députée insoumise Clémence Guetté (qui avait partagé en premier le communiqué du 25 juillet) en lui demandant «elle en est où la commission d’enquête de LFI sur les Jeux olympiques ? Les auditions ont été nombreuses et productives ?»

Les auditions ont commencé le 27 août

Contactée par CheckNews, la députée LFI Aurélie Trouvé, qui coordonne la commission d’enquête populaire, indique que les premières auditions ont commencé le 27 août et qu’elles doivent se dérouler encore durant tout le mois de septembre. Une «cinquantaine d’intervenants» devrait être entendue par les élus insoumis. Le rapport de la commission d’enquête populaire devrait être remis au début du mois d’octobre, alors que la rentrée parlementaire est prévue pour le 1er octobre. La députée de Seine-Saint-Denis avance que le lancement de cette commission spéciale et de ses auditions a été retardé par la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron le 9 juin.

En ce qui concerne son fonctionnement, Aurélie Trouvé indique que les huit grands thèmes sont répartis entre neuf députés insoumis. Ainsi elle a récupéré le sujet de «l’analyse budgétaire et économique». Sa collègue Gabrielle Cathala, parlementaire du Val-d’Oise, est chargée du dossier de l’impact des jeux en termes de libertés publiques. Le volet «exclusion, paupérisation, gentrification, conséquences sur la vie des habitants» revient à Maxime Laisney, député de Seine-et-Marne. Les impacts écologiques sont confiés à la députée de l’Essonne, Claire Lejeune. Elu en Haute-Garonne, François Piquemal, gère l’«héritage en matière de sport populaire». Les conséquences sur l’emploi et les droits du travail à Bérenger Cernon, élu de l’Essonne. L’impact sur l’accès à la culture et le monde culturel reviennent à Sarah Legrain, députée de Paris. Et enfin, Léo Walter, ancien député des Alpes-de-Haute-Provence, et Jean-François Coulomme, député de Savoie, sont chargés de coordonner le dossier des «leçons et questionnement pour les Jeux olympiques en France en 2030», puisque dans six ans les JO d’hiver se dérouleront dans les Alpes françaises.

Une vingtaine d’auditions prévues

A ce jour, Aurélie Trouvé indique que six auditions ont déjà eu lieu sur les thèmes des libertés publiques et du travail. Des représentants associatifs (La Quadrature du Net, Amnesty International, Observatoire international des prisons, Utopia 56), syndicaux (Syndicat de la magistrature, Syndicat des avocats de France, CGT du spectacle, CGT Seine-Saint-Denis, CNT Sécurité /services d’ordre) et des avocats (Vincent Brengarth, Samy Djemaoun, Alexis Baudelin, Mohamed Jaite) ou encore la Commission nationale consultative des droits de l’homme ont notamment été reçus à l’Assemblée nationale. Ces invités sont en grande majorité orientés à gauche, en raison de leur défense des libertés publiques et des populations précaires.

Dix auditions sont déjà programmées sur les sujets des impacts écologiques, économiques et l’héritage des JO, ainsi que les Jeux d’hiver de 2030. Selon l’agenda transmis à CheckNews par Aurélie Trouvé, elles devraient recevoir les sportifs Djilali Bedrani (athlétisme) et Anissa Benyoub (boxe), une journaliste, un chercheur spécialiste de la transition écologique, des économistes, dont «deux économistes du CDES, responsable de l’étude d’impact économique des JOP 2024 réalisée pour le COJOP», ainsi que des responsables syndicaux. Aurélie Trouvé assure aussi que «plusieurs rendez-vous sont encore à caler» d’ici la fin du mois de septembre, «par exemple sur les coûts cachés et la transparence financière, et sur les impacts pour les artisans et commerçants parisiens» ou encore sur le thème de la culture.

Si à ce stade, les auditions n’en sont qu’à leur début, et devraient durer jusqu’à la fin du mois de septembre, les insoumis ont commencé à en partager certaines sur les réseaux sociaux. Ainsi le 27 août, jour de la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques, Gabrielle Cathala, élue du Val-d’Oise a partagé l’agenda des auditions qu’elle a menées et qu’elle a ensuite mises en ligne en intégralité sur sa chaîne YouTube. Ces captations permettent de découvrir les inquiétudes des intervenants concernant l’utilisation de la reconnaissance faciale et des données biométriques lors des JO, ou encore l’augmentation des mesures répressives, comme les assignations à résidence ou l’utilisation accrue de la comparution immédiate.

Une commission parlementaire officielle à venir

Interrogé lundi 9 septembre sur France Info, le député insoumis Eric Coquerel a brièvement évoqué la commission «officieuse» lancée par LFI fin juillet, et annoncé «qu’avec la commission des affaires culturelles qui a le leadership sur les JO, nous allons lancer soit une mission d’information, soit une commission d’enquête dans les mois à venir – faut laisser retomber un peu les choses – sur au moins les questions de retombée économique des JO».

Sollicitée sur cette distinction, Aurélie Trouvé confirme que le groupe insoumis va faire une demande de commission d’enquête parlementaire «officielle». Cette «véritable commission d’enquête» qui devrait être transpartisane pourrait avoir beaucoup plus de prérogatives : «A l’heure d’aujourd’hui, je ne peux pas saisir les documents budgétaires adéquats, ni les partenariats des documents d’appels d’offres, je n’ai pas la possibilité de contraindre telle ou telle multinationale à nous répondre», indique la députée de Seine-Saint-Denis, qui justifie la mise en place de la commission d’enquête populaire pour que les problématiques liées au JO ne tombent pas dans le désintérêt du public.