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Où en est le référendum d’initiative partagée sur la taxation des superprofits ?

Le Conseil constitutionnel a jusqu’au 26 octobre pour déterminer si la proposition de loi référendaire sur les superprofits, portée par la Nupes, peut conduire à un référendum d’initiative partagée.
Lors de la conférence de presse organisée par l'intergroupe de la Nupes pour présenter le projet de référendum d’initiative partagée sur la taxation des superprofits, à Paris le 21 septembre. (Xose Bouzas/Hans Lucas / AFP)
publié le 12 octobre 2022 à 13h32

Face à la hausse du coût de la vie, et au constat que certaines multinationales, notamment dans le secteur de l’énergie, engrangent des profits exceptionnels et jugés «non mérités», en raison du contexte de guerre en Ukraine, des parlementaires de la Nupes souhaitent «forcer le président de la République» à taxer ces superprofits, selon l’expression du premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure. Leurs amendements ayant été rejetés à l’Assemblée nationale cet été, les élus de gauche espèrent obliger le président de la République en passant par un autre moyen démocratique : le référendum d’initiative partagée (RIP).

Prévu par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, ce dispositif entré en vigueur le 1er janvier 2015 sert à ouvrir une procédure qui permettra d’organiser un référendum sur une proposition de loi.

Premiers pas

Pour aboutir au référendum, il faut franchir plusieurs étapes complexes : des députés doivent d’abord déposer une proposition de loi. Le Conseil constitutionnel vérifie alors si le texte déposé est conforme à la Constitution et rempli des critères de représentativité. Si tel est le cas, alors une course aux signatures de 10% des citoyens inscrits sur les listes électorales est enclenchée durant neuf mois. Ils peuvent donner leur accord par internet ou en mairie ou préfecture. Enfin si cet objectif est atteint et si la proposition de loi n’est pas examinée au moins une fois par l’Assemblée nationale et le Sénat dans les six mois qui ont suivi publication au Journal Officiel de la décision du Conseil constitutionnel déclarant que le seuil des 10% d’électeurs est atteint, alors le président de la République doit la soumettre au référendum.

Ce procédé a été mis en pratique, sans succès, pour la première fois en 2019 pour tenter d’«affirmer le caractère de service public national de l’exploitation des aérodromes de Paris» et ainsi contrer le projet de privatisation du groupe ADP. Les lecteurs attentifs de CheckNews s’en souviennent, puisque nous avions très régulièrement publié des estimations du nombre de signatures recueillies pour cette initiative (avant que l’écart entre signatures obtenues et l’objectif de 4,7 millions ne se creuse trop et rende l’objectif inatteignable). L’initiative n’ayant reçu que 1 093 030 soutiens durant le temps de consultation, elle n’avait pas pu franchir les étapes suivantes.

Concernant les superprofits, l’organisation d’un référendum d’initiative partagée en est actuellement à ses premiers pas. Le 21 septembre, la présidence de l’Assemblée nationale a enregistré la «proposition de loi présentée en application de l’article 11 de la Constitution portant création d’une contribution additionnelle sur les bénéfices exceptionnels des grandes entreprises», déposée par 242 députés et sénateurs de la Nupes.

Un mois pour rendre sa décision

C’est désormais au Conseil constitutionnel de juger de la recevabilité de cette proposition de loi. Joint par CheckNews, il indique seulement que le dossier a bien été «enregistré le 26 septembre» et qu’il dispose désormais «d’un délai d’un mois» pour rendre sa décision.

Comme il le détaille sur son site, durant ce laps de temps, le Conseil constitutionnel vérifiera que la proposition de loi est «présentée par au moins un cinquième des membres du Parlement», qu’elle «respecte les conditions posées aux troisième et sixième alinéas de l’article 11 de la Constitution» (c’est-à-dire qu’elle porte «sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions»), qu’elle ne vise pas à abroger une disposition législative promulguée depuis moins d’un an, qu’elle ne porte pas sur le même sujet qu’une proposition de loi rejetée par référendum il y a moins de deux ans (a priori ce n’est pas le cas puisqu’il n’y a pas eu de référendum en France depuis 2005) et enfin «qu’aucune disposition de la proposition de loi n’est contraire à la Constitution».

D’ici le 26 octobre, si toutes ces conditions sont remplies, le Conseil constitutionnel communiquera le nombre précis de soutiens d’électeurs à atteindre, qui doit être équivalent à un dixième des électeurs inscrits, soit environ 4,8 millions de Français. Le ministère de l’Intérieur sera chargé de mettre en place les moyens de récolter ces signatures, notamment grâce à une plateforme en ligne.