Tags sur des habitations de juifs, cocktails Molotov jetés sur une synagogue, depuis l’attaque du 7 octobre contre Israël, Berlin observe une augmentation des actes antisémites. Mais c’est une tout autre séquence qui a suscité l’émotion dans la capitale. Dans une vidéo partagée ce mardi 31 octobre par la journaliste germano-israélienne Antonia Yamin, on peut voir des policiers berlinois arracher des affiches accrochées sur une colonne publicitaire, qui rendaient pourtant hommage aux otages kidnappés par le Hamas.
Was hier geschieht, geschieht wahrscheinlich im Namen des Gesetzes. Aber es ist trotzdem sehr verstörend und traurig 😢 #BringThemHomeNow @polizeiberlin pic.twitter.com/d9mIkGo6Os
— Antonia Yamin אנטוניה ימין (@antonia_yamin) October 31, 2023
«Ce qui se passe ici se passe probablement au nom de la loi. Mais c’est quand même très perturbant et triste», commente la reporter politique du journal Bild, accompagnant sa publication du hashtag #BringThemHomeNow (en français, «Ramenez les à la maison maintenant») qui vise à sensibiliser sur le sort des otages capturés par le Hamas.
Profils
«Soupçons d’affiches non autorisées»
Les affiches figurant sur cette colonne sur lesquelles on distingue le mot «entführt», qui signifie «enlevé» ou «kidnappé», font partie de la campagne #KidnappedFromIsrael qui cherche à sensibiliser l’opinion publique sur le sort des Israéliens et des étrangers enlevés par le Hamas lors de l’attaque du 7 octobre. Comme a pu le constater CheckNews sur place, ces affiches sont collées dans de nombreux quartiers de la capitale allemande. Elles montrent les visages, les noms et prénoms, âges et nationalités des personnes capturées par le Hamas.
La publication de cette vidéo a suscité de nombreux commentaires s’interrogeant sur la pertinence de cette action de la police. «Curieusement, la police n’en a rien à faire des autres affiches sauvages», accusent certains internautes, qui parlent parfois de «scandale».
La police berlinoise est finalement revenue sur cette polémique, ce mardi 31 octobre. Dans un message publié sur le réseau social X, un de ses porte-parole indique que «la vidéo montre une opération du 26 octobre 23 à Friedrichshain [un quartier situé dans l’est de la ville, ndlr]. En raison de soupçons d’affiches non autorisées, nos collègues les ont retirées de la colonne publicitaire.»
Das Video zeigt einen Einsatz vom 26.10.23 in #Friedrichshain.
— Polizei Berlin (@polizeiberlin) October 31, 2023
Aufgrund des Verdachts unberechtigter Plakatierung entfernten unsere Kolleg. diese von der Litfaßsäule.
Eine abschließende Bewertung der @GStABerlin steht noch aus.
^yt https://t.co/1kLQCuDNYn
Plusieurs commentaires d’internautes avaient également pris la défense de la police qui ne faisait que lutter contre une forme d’affichage sauvage. La police berlinoise ajoute que le parquet général de Berlin est en train d’évaluer l’incident.
Polémique dans le nord de Londres
Une polémique similaire a également eu lieu au Royaume-Uni, où deux policiers ont été photographiés dans la ville de Edgware, située dans le nord du Grand Londres, en train de retirer des affiches montrant les otages du Hamas de la façade d’une pharmacie située sur une rue commerçante. La polémique a été relayée en France par l’homme politique d’extrême droite Gilbert Collard, qui affirme qu’«au Royaume-Uni, la police arrache les affiches des Israéliens kidnappés par le Hamas pour “atténuer” les tensions raciales dans le pays». D’autres commentaires accusent la police anglaise d’appliquer un deux poids, deux mesures, puisqu’elle ne sanctionne pas les slogans antisémites qui ont été proclamés durant les manifestations propalestiniennes, alors qu’elle retire ces affiches en soutien aux otages israéliens.
Instead of arresting the mob chanting antisemitic slogans today the @metpoliceuk are removing hostage posters from a place in Edgware. WTF is going on in this country @CST_UK @antisemitism @mishtal @BoardofDeputies pic.twitter.com/7n4EvhR44P
— (((kathyschindler))) (@schinds21) October 28, 2023
Le Daily Mail précise que la pharmacie semble avoir été particulièrement visée en raison de commentaires antisémites postés sur les réseaux sociaux par le patron de la pharmacie, Hassan Khan. Le chef d’entreprise s’est défendu sur Facebook ce samedi 28 octobre en disant que ces publications en son nom ont été postées par un ancien employé. Le journal précise également qu’une importante communauté juive vit à Edgware.
Interrogée par le Daily Mail sur l’action de ces deux agents, la police londonienne a expliqué que «les affiches ont été placées tard dans la nuit de samedi à dimanche [28 au 29 octobre 2023 ; ndlr]. Nous avons reçu au moins deux appels de résidents locaux à ce sujet. Ils pensaient que les affiches avaient été apposées sur ces volets en représailles à des commentaires sur le conflit entre Israël et le Hamas qui avaient été faits sur les réseaux sociaux par une personne associée à l’entreprise. Il semble que des impressions de ces commentaires aient également été placées à côté des affiches. Les deux personnes qui nous ont signalé les affiches craignaient qu’elles n’aggravent une situation déjà tendue. Les agents se sont rendus dans le magasin et, agissant de bonne foi, ont retiré les affiches afin d’éviter une telle escalade».
Scotland Yard ajoute que «le retrait de ces affiches dans d’autres quartiers de Londres a suscité la colère et le mécontentement ces dernières semaines. Nous savons qu’une photo de nos agents faisant de même suscitera encore plus d’inquiétude, en particulier chez ceux qui n’ont pas connaissance de tous les faits qui nous ont été rapportés à l’époque. Nous ne souhaitons en aucun cas limiter le droit de quiconque de protester ou de sensibiliser l’opinion au sort des personnes enlevées et à l’impact terrible sur leurs familles. Mais nous avons la responsabilité de prendre des mesures raisonnables pour éviter que les problèmes ne s’aggravent et que les tensions au sein de la communauté n’augmentent. En l’occurrence, c’est ce que les agents ont essayé de faire».