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Pourquoi un amendement excluant le pass vaccinal des bureaux de vote a-t-il été rejeté par l’Assemblée nationale?

Un amendement visant à exclure la présentation du pass vaccinal des lieux d’exercice de la démocratie a été rejeté par l’Assemblée nationale. Le rapporteur souligne que la Constitution garantit déjà l’accès aux bureaux de vote à tous les citoyens, vaccinés ou non.
Tout le monde pourra voter à la présidentielle, vacciné ou non. (Bruno Amsellem/Libération)
publié le 10 janvier 2022 à 15h59

Bonjour,

Suite au rejet d’un amendement porté par la députée LR Anne-Laure Blin, qui souhaitait «garantir l’accès aux lieux d’exercice de la démocratie» à tout citoyen, sans tenir compte de son statut vaccinal ou de la présentation d’un pass sanitaire, plusieurs personnes affirment que le gouvernement et sa majorité parlementaire veulent «empêcher les non-vaccinés de voter». Cet amendement proposait d’inscrire la phrase, «les lieux d’exercice de la démocratie sont exclus formellement de la liste des lieux dans lesquels est exigé un passe sanitaire ou un passe vaccinal», dans le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire.

Lors de sa présentation à l’Assemblée nationale, durant la session du 5 janvier, Anne-Laure Blin a soutenu que sa proposition «revêt une importance particulière suite aux déclarations du président de la République. Nous avons déjà débattu de l’accès aux lieux d’exercice de la démocratie. Or le chef de l’Etat semble considérer les personnes non vaccinées comme des irresponsables, qui ne seraient plus des citoyens. Il convient donc de leur garantir qu’ils pourront exercer leurs droits civiques et civils, notamment à l’occasion des prochaines échéances électorales».

Comme l’indique le compte rendu de la séance, la commission des lois, par la voix de son rapporteur, le député Jean-Pierre Pont, et le ministre Olivier Véran ont émis un avis défavorable. Ce qui a provoqué la réaction du député insoumis François Ruffin, défendant à son tour l’amendement en demandant au gouvernement d’apporter «une garantie» et d’écrire «noir sur blanc que les Français pourront voter – qu’ils soient vaccinés ou non – lors des prochaines élections présidentielles et législatives» ! Ce à quoi le député Modem Bruno Millienne a répondu que ce n’était pas nécessaire «car c’est dans la loi». L’amendement n’a pas été adopté.

Le projet de loi «ne modifie pas le champ d’application du pass sanitaire»

Contacté par CheckNews, Jean-Claude Briffault, le directeur de cabinet du rapporteur Jean-Pierre Pont justifie l’avis défavorable par le fait qu’ «on ne met pas dans un texte de loi quelque chose qui est déjà établi par la Constitution». Un avis partagé par le député Bruno Millienne, qui explique que sa réponse à François Ruffin faisait allusion à la Constitution, qui «protège déjà l’exercice du droit de vote». Et de citer la décision du Conseil constitutionnel du 9 novembre 2021, qui assure qu’ «en période électorale, la présentation du “pass sanitaire” ne peut être exigée pour l’accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques». Le député de la majorité présidentielle souligne qu’«en vertu de la hiérarchie des normes, inscrire dans la loi que “la présentation du “passe sanitaire” ne peut être exigée pour l’accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques” n’est pas utile puisque déjà présent dans la Constitution».

Bruno Millienne insiste également sur le fait que le projet de loi «ne modifie pas le champ d’application du pass sanitaire, mais transforme ce dernier en passe vaccinal», et que «les réunions politiques et les bureaux de vote étant exclus du champ d’application du passe sanitaire, il en est de même pour le passe vaccinal».

En juillet 2021, CheckNews s’était déjà penché sur des amendements de même nature défendus par des députés et sénateurs pour garantir l’accès aux bureaux de vote pour les personnes ne disposant pas d’un pass sanitaire à jour. Nous expliquions déjà alors que le texte du projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire, adopté par le Parlement le 25 juillet, ne concernait pas les bureaux de vote car ils n’étaient pas mentionnés parmi les lieux soumis à la présentation du pass sanitaire. Olivier Véran promettait également cet été que les bureaux de vote ne seraient pas inscrits parmi les lieux nécessitant un pass sanitaire en déclarant qu’ «il n’y a eu aucune intention de mettre pareille mention dans le texte. Cela l’exclut de fait».

Contacté par CheckNews, le cabinet d’Olivier Véran n’a pas répondu à notre sollicitation. Désormais le projet de loi doit passer par le Sénat.