Agressé dans sa rue. Le samedi 14 octobre, un «sexagénaire d’origine maghrébine», comme le décrit son avocat Sefen Guez Guez, né en Tunisie, a été insulté et frappé au Cannet (Alpes-Maritimes), alors qu’il descendait de chez lui pour aider sa femme à monter les courses. L’un de ses agresseurs lui aurait crié «sale arabe, je vais te découper en morceaux et t’envoyer à Jérusalem !» d’après le communiqué publié par Maître Guez Guez sur Twitter (rebaptisé X) le lendemain des faits. Pour l’avocat, il n’y a aucun doute. C’est «une agression au mobile raciste évident», a-t-il écrit. «Le samedi 14 octobre 2023 en début d’après-midi au Cannet, un individu âgé de 25 ans dégradait la devanture d’un commerce (fleuriste) appartenant à son père, en y portant une trentaine de coups de marteau. Un passant âgé de 66 ans intervenait pour faire cesser les dégradations. Un second individu, porteur d’une kippa, qui accompagnait l’auteur des dégradations, prenait alors à partie le passant sexagénaire, lui portant un coup de poing au visage, selon les dires de la victime en s’emparant du marteau pour tenter de le frapper», détaille le parquet de Grasse, dans un communiqué.
Dans sa plainte déposée le jour même (et complétée par la suite) que CheckNews a pu partiellement consulter, Ali (1) relate plus précisément son agression. C’est alors qu’il se dirigeait vers son immeuble pour rentrer chez lui, que «l’homme à la kippa» lui aurait crié «sale arabe je vais te découper en morceau et je vais t’envoyer à Jérusalem». A noter que l’injure raciste et la référence à Jérusalem ont été ajoutées dans un complément à la première plainte déposé quelques jours plus tard. «Ça n’avait pas été noté au départ. À la relecture chez lui il s’en est rendu compte», explique Maître Guez Guez.
«Aucun conflit personnel»
Un témoin de la scène, contacté par CheckNews, confirme avoir entendu des insultes à caractère raciste : «Je suis descendue pour aller à mon travail. J’ai vu un monsieur qui voulait ouvrir la porte du fleuriste et un autre avec un marteau. Je leur ai demandé ce qu’ils faisaient et l’un d’eux me dit qu’il est le fils du fleuriste. […] L’autre part avec son marteau vers le Tunisien. Il lui dit : “T’es un sale arabe, je vais te massacrer et te couper en morceau”». Ce témoin indique en revanche ne pas avoir entendu de référence à Jérusalem.
C’est après cette invective que «l’homme à la kippa» se dirige vers Ali, un marteau à la main. «Il a commencé à me parler en arabe littéraire en m’insultant […]. Il s’est approché de moi avec un marteau pour me frapper avec, mais j’ai réussi à l’esquiver. Il m’a alors porté un coup de poing avec son autre main, au niveau de ma pommette gauche, j’ai vacillé», a-t-il détaillé aux policiers. Ses lunettes sont cassées. L’homme de 66 ans est alors transporté à l’hôpital et se voit délivrer une ITT d’un jour pour un hématome à l’œil gauche. L’auteur, lui, a pris la fuite. «L’enquête se poursuit désormais en flagrance pour identifier l’auteur des violences et en préciser les circonstances exactes», indique le parquet qui ne confirme ni n’infirme le caractère raciste de l’agression. Sur ce point, l’avocat de la victime maintient et ajoute qu’il n’y a «aucun conflit personnel entre les deux» concernés.
«Sous traitement médical»
Concernant le fils du fleuriste qui s’en est pris à la vitrine de son père, le parquet indique : «A l’arrivée des forces de l’ordre, l’auteur des dégradations tenait des propos délirants qui justifiaient son hospitalisation en psychiatrie pour quelques heures». D’après les propos d’Ali, qui connaissait le fleuriste, le jeune homme serait «malade psychiatriquement».
L’histoire ne s’arrête pas là. Dans l’après-midi, Ahmed (1), le fils d’Ali est «désigné comme ayant proféré des menaces de violences envers la communauté israélite sur la voie publique, réitérant ses propos à l’arrivée de la police municipale», indique le parquet. Interpellé et placé en garde à vue, Ahmed a reconnu «l’intégralité des propos tenus, les justifiants par l’agression subie plus tôt dans la journée par son père». Questionné par les policiers sur les propos de son fils, Ali dit ne pas comprendre «comment il a été avisé, car il n’était pas là». Déféré lundi pour être jugé en comparution immédiate «des chefs de provocation à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne en raison de son origine ou de son appartenance à une ethnie ; une nation, une race ou une religion déterminée», il encourt notamment une peine d’un an d’emprisonnement, détaille le parquet. D’après Sefen Guez Guez, le jugement a été renvoyé.
(1) Les prénoms ont été modifiés.