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Tsahal reconnaît avoir frappé une ambulance devant l’hôpital al-Shifa de Gaza, mais assure avoir ciblé des membres du Hamas

Les images diffusées sur les réseaux sociaux montrent de nombreuses personnes touchées, dont des enfants, devant le plus grand hôpital de Gaza. Tsahal revendique la frappe, assurant avoir ciblé une ambulance utilisée par le Hamas.
Des Palestiniens tirent une ambulance après qu'un convoi a été touché, à l'entrée de l'hôpital Shifa dans la ville de Gaza, le 3 novembre 2023. (STRINGER/Reuters)
publié le 3 novembre 2023 à 19h19

Une frappe israélienne sur une ambulance a fait plusieurs victimes, hier, aux abords immédiats de l’hôpital al-Shifa, le plus grand de Gaza. Vendredi 3, en milieu d’après midi, plusieurs publications sur les réseaux sociaux, montraient une scène de chaos en pleine rue à Gaza. Les commentaires accompagnant ces images assurant : «des avions de l’armée israélienne ont bombardé un convoi d’ambulances devant l’entrée principale de l’hôpital al-Shifa, qui se préparait à partir pour le sud de Gaza».

L’hôpital al-Shifa, situé dans le nord du quartier de Rimal, à Gaza City, sur la partie nord de l’enclave, est le plus grand de la bande de Gaza. Les alentours de cet établissement sont facilement reconnaissables. On repère en effet en arrière-plan la mosquée Borno et la station essence Khozindar Petrol. Des éléments qui permettent d’affirmer que cette scène est effectivement filmée sur la rue Shifa - Ezz Eldine Al-Qassam, soit aux abords directs de l’établissement hospitalier.

Sur les vidéos très choquantes, on distingue notamment une ambulance siglée de la PRCS (Palestine Red Crescent Society) à l’arrêt, les parois extérieures ensanglantées et le capot avant en partie défoncé à droite. Des photos suggèrent que les dégâts visibles sur l’ambulance auraient pu être causés par une collision avec une autre voiture arrivant en sens inverse, dont l’aile droite est abîmée. Sur les images que CheckNews a pu voir, on ne distingue pas de cratère.

Au moins sept personnes visiblement blessées, dont une femme âgée et plusieurs enfants, sont extirpées de la scène. Au pied de l’ambulance, un attroupement s’est formé auprès d’au moins cinq corps inertes. De l’autre côté du véhicule, on distingue trois corps, mais l’agitation à cet endroit laisse supposer qu’il puisse y en avoir davantage. Ce qui porte à quinze, au minimum, le nombre de personnes touchées visibles sur cette vidéo.

Une autre photo de cette scène, prise de l’autre côté de la rue, montre cette même ambulance entourée de débris, le corps d’un cheval gisant à ses côtés.

L’AFP rapportait vendredi une réaction du Hamas, assurant que la frappe a visé «un convoi d’ambulances qui s’apprêtait à transporter des blessés de l’hôpital al-Shifa» vers la frontière avec l’Egypte. «Ce massacre a fait des dizaines de morts et blessés», a-t-il dit.

Selon un communiqué de la Palestine Red Crescent Society (PRCS), publié samedi, et que CheckNews n’était pas en mesure de vérifier, un convoi de 5 ambulances, 4 du ministère de la Santé et une de l’ONG aurait quitté l’hôpital Al-Shifa à 16h, en direction de Rafah, pour acheminer des blessés. Le convoi aurait rebroussé chemin à 4 kilomètres de l’hôpital après avoir dû stopper en raison de dégâts accumulés sur la route résultant d’une frappe israélienne. A un kilomètre de l’hôpital, une première frappe aurait touché l’ambulance de tête, blessant les personnes à bord. Le convoi aurait continué, jusqu’à ce qu’une seconde frappe, à immédiate proximité de l’hôpital, ne touche l’ambulance du PRCS, qui transportait selon l’organisation une femme de 35 ans). Cette seconde frappe -qui correspond aux images géolocalisées par CheckNews- aurait occasionné 15 morts et plus de 60 blessés parmi les personnes qui se situaient devant l’entrée de l’établissement, toujours selon la PRCS. Un bilan que nous ne sommes pas en mesure de confirmer.

Tsahal revendique

Treize personnes ont été tuées et 65 autres blessées, selon le directeur de l’hôpital al-Shifa, Mohamed Abu Selima, cité par le Washington Post.

CheckNews a sollicité l’armée israélienne. Dans la soirée de vendredi, Tsahal nous a répondu, revendiquant une frappe, mais n’en évoquant qu’une, et un seul véhicule : «Un appareil de l’armée israélienne a frappé une ambulance identifiée comme étant utilisée par le Hamas à proximité de leur position dans la zone de combat. Un certain nombre de terroristes ont été tués dans la frappe.»

Sur CNN, un autre porte-parole de l’armée israélienne, Jonathan Conricus,a déclaré : « nos forces ont vu des terroristes utiliser des ambulances pour se déplacer. Ils ont perçu une menace, et nous avons donc frappé cette ambulance.» Interrogé sur le nombre de membres du Hamas qui auraient été tués dans la frappe, le porte-parole a affirmé « ne pas avoir le nombre exact ». Interrogé sur la part des civils parmi les victimes, Jonathan Conricus n’a pas répondu, affirmant seulement avoir vu sur les images « beaucoup d’hommes jeunes. Je n’ai pas vu d’armes. Peut-être ont-elles été cachées avant que les équipes de télévision n’arrivent.» Le porte-parole n’a pas évoqué les femmes et les enfants qu’on voit distinctement parmi les victimes, sur les vidéos.

Comme le notait l’AFP, Richard Hecht, un des porte-parole de Tsahal, avait affirmé à des journalistes plus tôt dans la journée «qu’il y a des situations où ils [les membres du Hamas, ndlr] utilisent un véhicule civil pour transporter des terroristes». «Nous ne tirons pas sur des ambulances et des hôpitaux si nous comprenons qu’ils sont uniquement civils, et font ce qu’ils sont censés faire», avait-il ajouté.

Le 27 octobre dernier, l’armée israélienne assurait que le Hamas se servait de l’hôpital al-Shifa pour abriter son quartier général dans ses sous-sols. Affirmation démentie par le groupe palestinien.

La frappe a suscité de nombreuses réactions de la communauté internationale. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est dit « horrifié » : « les images des corps éparpillés dans la rue devant l’hôpital sont déchirantes », a-t-il déclaré.

Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, a déclaré de son côté : « Nous sommes absolument horrifiés par l’attaque contre un convoi d’ambulances évacuant des patients près de l’hôpital Shifa. Nous le répétons : les patients, les agents de santé et les ambulances doivent être protégés à tout moment.»

clarification
Edit 3 novembre 20h45 : ajout de la revendication de Tsahal

Article mis à jour samedi 4 novembre à 15h45 avec ajout du communiqué de la PRCS