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Que sait-on de l’interpellation d’un militant CGT accusé d’avoir tenu des propos antisémites envers Zemmour ?

Selon le procureur de Limoges, une enquête a été ouverte pour «injures publiques à caractère racial et religieux».
Eric Zemmour à Paris, en 2022. (Carine Schmitt/Hans Lucas. AFP)
publié le 22 juin 2023 à 15h43

Gros remous en marge d’un déplacement d’Eric Zemmour à Limoges, venu présenter son dernier livre dans une salle de la municipalité. Mercredi 21 juin dans l’après-midi, Frédéric Tronche, un militant CGT cheminots de la Haute-Vienne, a été interpellé à la gare puis placé en garde à vue. En cause : des invectives qu’il aurait lancées à l’ancien candidat d’extrême droite à la présidentielle, alors qu’il se trouvait dans le même train que lui en direction de la préfecture du département.

Auprès de CheckNews, l’état-major de la Direction départementale de la sécurité publique de Haute-Vienne confirme qu’une interpellation a bien eu lieu à la gare mercredi aux alentours de 16 heures. Cette dernière a été levée à 23 h 05 le même jour. «Une enquête est en cours», précise notre source. Une information confirmée par le procureur de Limoges, qui indique à CheckNews que l’enquête ouverte pour «injures publiques à caractère racial et religieux» est toujours en cours, «notamment pour identifier d’autres témoins, dont certains ont déjà été entendus».

«Je vérifie si le train va bien à Limoges... peur qu’il aille en Pologne»

L’affaire fait désormais l’objet d’une vive polémique et de diverses interprétations. La CGT évoque une blague antifasciste ; les partisans d’Eric Zemmour dénoncent quant à eux des propos antisémites. Ce jeudi matin, la situation a provoqué une réaction de la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. Elle indique que le militant a «interrogé le contrôleur pour savoir si le train ne va pas à Vichy». Et en a profité pour interpeller le ministre de l’Intérieur et la Première ministre. «Comme nous l’avons indiqué à vos cabinets, notre camarade à de graves problèmes de santé», précise-t-elle.

Dans la foulée, Nicolas Bay, soutien de Zemmour, a lui aussi réagi, donnant une autre version. Selon lui, le militant a lancé à Eric Zemmour la phrase «Tu prends le train pour Auschwitz ?» Sollicité par CheckNews afin d’être mis en contact avec des témoins directs, ce dernier n’a pas répondu. Dans un communiqué de Reconquête, le mouvement indique qu’il aurait ajouté : «Je ne savais pas que c’était le train pour Dachau ?» devant témoins et «pris en flagrant délit par la police qui a pu considérer ces propos comme invitant à la haine en raison de la race ou de la religion». Le communiqué ajoute qu’une plainte a été déposée par Eric Zemmour.

Sur la page Facebook de Frédéric Tronche, de nombreux internautes ont également repéré un post qu’il a publié avant d’être interpellé, indiquant : «Zemmour dans mon train… je vérifie si le train va bien à Limoges… peur qu’il aille en Pologne...»

Dans les commentaires ont rapidement fleuri des accusations d’antisémitisme ainsi que des menaces de mort à l’encontre du militant.

De son côté, le principal intéressé ne souhaite pas s’exprimer. A sa place, Arnaud Raffier, secrétaire général de l’union départementale de la CGT Haute-Vienne indique dans un premier temps à CheckNews que «rien n’a été dit» par le militant, «hormis le post Facebook dont les zemmouriens se servent pour créer la polémique». Dans un second temps, il admet toutefois que Frédéric Tronche aurait «parlé, avec d’autres personnes, à Eric Zemmour sur le quai de la gare, et lui a rappelé un certain nombre de faits. D’abord les diverses condamnations de Zemmour ainsi que sa volonté de réhabiliter Pétain.» Pour le secrétaire général, «rien n’étaye la survenue de propos antisémites».

Des réseaux sociaux sans proximité avec l’antisémitisme

A noter que les autres publications sur les réseaux sociaux du militant que CheckNews a pu consulter avant leur suppression ne témoignent pas d’une proximité avec des thèses antisémites. Ainsi, le même jour, quelques heures après le post Facebook polémique, Frédéric Tronche a relayé sur sa page l’appel à manifestation contre la venue d’Eric Zemmour à Limoges. Il précisait alors notamment : «Chaque phrase a minima délirante, sinon abjecte, prononcée ou écrite par le candidat d’extrême droite tord le réel à sa convenance à des fins électorales. Au choix sur Vichy, Maurice Papon ou encore l’affaire Dreyfus, Zemmour utilise les mêmes escroqueries intellectuelles qu’ont employées les fascistes en leur temps. […] Autoriser Zemmour dans une salle municipale, c’est tourner le dos à la terre de résistance que représente le Limousin. C’est mettre ses pieds dans les chaussons des mairies de droite qui ont dirigé la ville pendant la collaboration. C’est choisir les adorateurs de Maurras plutôt que les descendants de Georges Guingouin [résistant communiste de Haute-Vienne, ndlr] et de Gaulle.»

Le 11 juin dernier, il publiait également une photo de lui indiquant «l’Ugict face à l’Action française. Pas de fachos sur notre terre de résistance…» Et la veille, un message en mémoire du massacre du village d’Oradour-sur-Glane par les nazis, avec cette légende : «10 juin 1944… ni oubli ni pardon…»