Des déclinaisons du célèbre Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat s’implanteraient-elles en région ? C’est l’impression qu’ont pu laisser plusieurs articles de presse reprenant un rapport dévoilé mercredi 12 avril par le «Giec des Pays-de-la-Loire». Ainsi, le Huffington Post, s’appuyant sur une dépêche AFP, titrait : «Dans les Pays-de-la-Loire, le Giec suggère d’interdire les méga bassines». Un titre critiqué, puis modifié car trompeur.
Comme l’a précisé sur Twitter François Gemenne, co-auteur du dernier rapport du Giec «international», «le Giec est un organisme intergouvernemental qui ne compte pas d’antennes locales, ne publie pas de rapports locaux et ne formule pas de recommandations politiques».
Je pense très important de rappeler ici que le GIEC est un organisme intergouvernemental qui ne compte pas d’antennes locales, ne publie pas de rapports locaux et ne formule pas de recommandations politiques. https://t.co/VjlSvKMH8T
— François Gemenne (@Gemenne) April 12, 2023
Une initiative locale
De fait, les deux Giec n’ont rien à voir. Le Giec originel est bien celui qui produit les rapports internationaux sur le climat. Le Giec des Pays-de-la-Loire, lui, est en réalité un Groupement interdisciplinaire sur les évolutions du climat spécifique aux Pays-de-la-Loire : une initiative locale, lancée en octobre 2020 par la région et le Comité 21 Grand Ouest, «réseau des acteurs du développement durable» dans la zone. Une initiative qui n’est ni isolée ni nouvelle : le premier «Giec régional», AcclimaTerra, est né d’une initiative de 2011 en Aquitaine (actuellement Nouvelle-Aquitaine). Aujourd’hui, douze régions se sont dotées d’un de ces outils, le plus souvent baptisés «Giec» ou, de manière plus logique, «Grec».
Des noms proches, pour un fonctionnement peu éloigné. Interrogée par CheckNews, Virginie Raisson-Victor, présidente du Giec des Pays-de-la-Loire, explique que les chercheurs sont sélectionnés pour leur «expertise scientifique» dans leur domaine et leurs «liens avec la région», et produisent leurs travaux «sur la base d’un ensemble de documents et d’études à leur disposition» – à l’instar du Giec, qui s’appuie sur de l’existant. Ses travaux, eux, visent à «traiter et partager les données climatiques régionales pour vulgariser les connaissances sur l’impact du changement climatique en Pays-de-la-Loire», ce qui a été fait dans un rapport en juin, mais aussi à «éclairer les décisions du territoire». Une deuxième mission que le Giec Pays-de-la-Loire accomplit avec des propositions précises dans son nouveau rapport, à la différence du Giec «international» qui se veut «non prescriptif».
Une dépêche de l’AFP en cause
Face au risque de confusion entre les noms, Virginie Raisson-Victor souligne «toujours utiliser l’acronyme avec le nom “Pays-de-la-Loire” derrière» et préciser que c’est «à ne pas confondre avec le Giec international» lors de ses interventions. Un risque qui n’a pas été évité lors de la publication de ce rapport, du fait d’une erreur de l’AFP qui a qualifié le Giec des Pays-de-la-Loire de «Giec régional» et même de «déclinaison régionale des experts climatiques de l’ONU» dans une première version de sa dépêche. Si la dépêche a été corrigée par la suite, la plupart des médias se sont fait prendre au piège entre-temps, Libération inclus.
Virginie Raisson-Victor, elle, est partagée. «Il y a tout un rapport, un travail qui dure des mois, et on bute sur un nom !» peste-t-elle. Avant de souligner : «Cette polémique sur le nom fait que des gens s’intéressent à ce qu’on fait. C’est assez amusant de voir l’importance qu’un acronyme peut avoir.»