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Qu’est-ce que le «jour de colère» décrété par le Hamas pour ce vendredi 13 octobre ?

L’appel du Hamas et de son ancien chef, Khaled Mechaal, à un jour de protestation en soutien à la Palestine ce vendredi, fait craindre à la diplomatie israélienne des attaques contre des juifs lors de rassemblements partout dans le monde.
Un drapeau israélien brûlé lors d'une manifestation à Bagdad, en Irak, ce vendredi 13 octobre. (Ahmad Al-Rubaye /AFP)
publié le 13 octobre 2023 à 14h39

Jeudi 12 octobre, six jours après les attaques terroristes du Hamas en Israël, le ministère des Affaires étrangères et le Conseil national de sécurité d’Israël alertaient, dans un communiqué conjoint, sur le «jour de colère», décrété par le Hamas vendredi 13 octobre.

Ils écrivent ainsi : «Dans le contexte de l’opération “Epées de fer”, les dirigeants du Hamas ont appelé tous leurs partisans dans le monde à organiser un “jour de colère” [vendredi 13 octobre] et à attaquer les Israéliens et les juifs. On peut raisonnablement supposer que des manifestations de protestation auront lieu dans différents pays et qu’elles risquent de tourner à la violence.» Et d’enjoindre les ressortissants israéliens à se tenir à distance des manifestations.

Les autorités israéliennes font ici référence à l’appel lancé par le Hamas, dès mardi, à une journée de mobilisation générale surnommée «vendredi du déluge Al-Aqsa». Cet appel a fait l’objet d’une couverture médiatique internationale à partir du mercredi 11 octobre, après une prise de parole filmée de l’ancien chef du Hamas, Khaled Mechaal. Cinq jours après les attaques terroristes du Hamas en Israël, l’ex-dirigeant a appelé à des manifestations en soutien aux Palestiniens, ce vendredi 13 octobre, à travers le monde arabe «ainsi que dans toutes les villes où il y a des communautés» islamiques.

«Rassemblements massifs»

Lors de cette intervention, traduite en anglais par le MEMRI (une ONG américaine qui surveille les déclarations dans les médias islamiques au Moyen-Orient), Khaled Mechaal appelle les habitants des pays voisins d’Israël, mais aussi de «toutes les nations» à ce qu’ils fassent «leur devoir». «Par Allah, lorsque le monde, l’Amérique, l’Occident et les sionistes verront que la nation [musulmane] est venue soutenir la mosquée Al-Aqsa et que des convois de moudjahidines sont en route pour verser leur sang pur sur la terre de Palestine, le champ de bataille changera, l’équilibre des forces changera», avertit Mechaal.

Plus long, le communiqué diffusé mardi par le Hamas appelait aussi la diaspora palestinienne et les musulmans, «à marcher vers les frontières de notre Palestine bien-aimée lors de rassemblements massifs», ou depuis à l’étranger à se mobiliser en soutien à la Palestine. Le même texte exhortait la «jeunesse rebelle de toute la Cisjordanie» à «secouer le sol sous les pieds des envahisseurs sionistes et de leurs gangs de colons» allant même jusqu’à les inviter à «affronter» les soldats israéliens «en tout lieu».

De fait, des milliers de personnes se sont réunies à Bagdad, Téhéran et Amman pour exprimer leur soutien aux Palestiniens, ce vendredi.

Les propos de Khaled Mechaal ont été interprétés par certains comme un appel au terrorisme global, puisqu’il vise «toutes les villes où il y a des communautés islamiques», comme en Europe ou aux Etats-Unis. En France, l’ancien candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle Eric Zemmour a publié un message vu près de 1 million de fois sur le réseau social X, dans lequel il alerte sur le fait que «le fondateur du Hamas appelle tous les musulmans du monde à “un jour de colère” ce vendredi 13 octobre. Il les pousse au jihad et à être prêts au “martyre”. Comme Israël, la France et l’Europe, qui ont accueilli les fans du Hamas dans leurs rues, sont en danger : c’est l’Occident tout entier que le Hamas et les Frères musulmans veulent détruire».

«Des mesures de protection» renforcées

Des messages internes présentés comme provenant de plusieurs cabinets d’avocats parisiens, diffusés jeudi soir, appelaient à la précaution leurs salariés et les incitaient à éviter les transports, en raison d’un risque d’attentat à Paris. Sollicités par CheckNews, les cabinets d’avocats n’ont pas confirmé être à l’origine de ces messages.

Côté autorités, CheckNews a contacté ce vendredi matin le cabinet de Gérald Darmanin. Ce dernier signale que «le ministre de l’Intérieur a encore réuni ses services deux fois [jeudi] et des mesures de protection sont mises en place pour plus de 580 lieux. 10 000 policiers et gendarmes sont mobilisés pour ce faire».

Relancée pour savoir si ce dispositif était lié à l’appel de l’ancien chef du Hamas, la place Beauvau assurait qu’il n’y avait pas «de menace particulière identifiée par les services français» et explique que ces renforcements sont «liés à l’atmosphère d’ensemble, au contexte global». Les 580 lieux cités sont liés la communauté juive, précise la place Beauvau, qui souligne que «le niveau de protection est toujours élevé pour les lieux où il y a des flux importants de personnes», comme les gares et les aéroports.

Attaque à Arras

Jeudi, le ministère de l’Intérieur a ordonné à tous les préfets d’interdire les «manifestations propalestiniennes parce qu’elles sont susceptibles de générer des troubles à l’ordre public» ainsi que de retirer les titres de séjours et d’expulser les étrangers qui commettraient des infractions, notamment en participant à ces manifestations illégales. Gérald Darmanin a aussi demandé de prononcer «l’expulsion d’individus proches du mouvement terroriste Hamas ou d’organisations faisant l’apologie du terrorisme». Malgré ces directives, des manifestations ont bien eu lieu ce jeudi soir à Paris et dans d’autres grandes villes de France.

Vendredi matin, un enseignant a été tué et deux personnes grièvement blessées dans un lycée d’Arras (Pas-de-Calais), par un homme armé d’un couteau. Selon l’AFP, le Parquet national antiterroriste a ouvert une enquête pour «assassinat en relation avec une entreprise terroriste». Il est impossible d’établir, pour l’heure, si ce geste, qui intervient trois ans après l’assassinat de Samuel Paty, est lié à l’appel du Hamas.