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Qu’est-ce que le «NeoCoV» et a-t-il quelque chose à voir avec le Covid-19?

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Une équipe chinoise a prépublié de nouvelles données sur un coronavirus de chauve-souris, proche du MERS-CoV, découvert en 2011. Si ce virus n’est pas pathogène pour l’homme dans sa forme actuelle, les auteurs de l’article ont identifié, en laboratoire, une mutation qui pourrait changer la donne.
A l'état naturel, le NeoCov, découvert chez la chauve-souris en 2014, ne présente que peu d'indices pathogènes pour l'être humain. (Annick Vanderschelden/Getty Images)
publié le 1er février 2022 à 19h43
(mis à jour le 2 février 2022 à 12h11)

Depuis plusieurs jours, de nombreux médias ont fait état d’un coronavirus baptisé «Neocov», en évoquant sa potentielle dangerosité pour l’homme, eu égard à sa parenté avec le MERS-CoV, dont le taux de létalité était très élevé. Plusieurs questions ont été adressées à CheckNews au sujet de ce virus.

Aucun lien avec le Covid-19

Premier point : il ne s’agit en aucun cas d’un nouveau variant du SARS-CoV-2 (le virus responsable du Covid-19) mais d’un autre membre de la vaste famille des coronavirus. Ce virus a été identifié en 2011 en Afrique du Sud chez une chauve-souris de l’espèce Neoromicia capensis. Le «Neo» de NeoCoV fait directement référence à Neoromicia, et non au fait qu’il s’agit d’un «nouveau» virus. Divers articles scientifiques publiés au cours de la dernière décennie y font référence au travers de la dénomination technique BtCoV/Neoromicia/PML-PHE1/RSA/2011.

Dans l’état actuel des connaissances, le virus infectant l’humain le plus proche de ce NeoCov est le virus MERS-CoV, ou coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient, responsable d’une épidémie dans cette région en 2012). Selon des travaux allemands de 2014, «85 % du génome du NeoCoV est identique au MERS-CoV au niveau des nucléotides. D’après les critères taxonomiques, le NeoCoV et le MERS-CoV appartient à la même espèce virale.» Le réservoir naturel du MERS-CoV s’avère être le chameau. Les auteurs de l’étude notaient que les chauves-souris pourraient avoir transmis des virus précurseurs du MERS-CoV aux camélidés.

Le 25 janvier, une équipe chinoise affiliée à l’académie des sciences de Beijing et à l’université de Wuhan a mis en ligne, sur un site de pré-publication d’articles scientifiques, une étude sur ce coronavirus de chauve-souris. Un article qui n’a pas encore été publié dans une revue à comité de lecture, et n’a pas encore été analysé de façon critique par d’autres chercheurs du domaine.

Un virus à «surveiller de près»

Ses auteurs expliquent qu’en l’état, NeoCoV (ainsi qu’un second virus étudié, PDF-2180-CoV), n’est que peu susceptible d’infecter l’humain. De fait, aucun cas de NeoCoV touchant un être humain n’a été répertorié dans la littérature scientifique.

L’étude chinoise décrit le mécanisme moléculaire utilisé par le virus pour infecter les cellules des chauves-souris, qui implique un récepteur ACE2, spécifique à ces animaux. Ses auteurs font ainsi état «d’un mode d’interaction de l’ACE2 qui est distinct de la façon dont l’ACE2 humaine interagit avec les [domaines de liaison] du SARS-CoV-2 [...]. Bien que NeoCoV et PDF-2180-CoV ne puissent pas utiliser efficacement l’ACE2 humaine sur la base de leurs séquences actuelles, [les événements de dérive génétique] de ce groupe de virus doivent être surveillés de près, compte tenu de leur potentiel d’émergence humaine».

Les chercheurs ont en effet constaté qu’en éditant le génome de NeoCoV en un point très précis (la mutation T510F), le virus se liait plus facilement aux cellules humaines au cours des expériences de laboratoire. Autrement dit : une mutation dans le génome de NeoCoV pourrait le rendre apte à se lier à l’ACE2 humaine et introduire son matériel génétique dans les cellules. Une telle mutation n’a cependant pas, à cette heure, encore été observée à l’état naturel.

Les auteurs de la prépublication relèvent enfin que les anticorps produits par des patients exposés au MERS ou au SARS-CoV-2 ne neutralisent pas le NeoCoV.

Du fait de sa parenté avec le MERS, très létal, certains articles de presse ont imputé au NeoCoV le même potentiel dévastateur que son cousin. Pourtant, le taux de létalité de 35% mentionné dans la pré-publication ne porte que sur le cas documenté du MERS. Aucune donnée ne prouve pour l’instant que si le NeoCoV acquérait la mutation identifiée en laboratoire, il présenterait la même dangerosité. Toutefois, selon l’agence de presse TASS, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré ce 27 janvier que des études supplémentaires étaient nécessaires pour déterminer si le NeoCoV constituait une menace pour l’homme.

Mise à jour le 2 février à 12:10 : le virus a été découvert en 2011 et non en 2014 comme précédemment mentionné dans le sous-titre