Question posée le 6 janvier,
Dans la nuit de mercredi à jeudi, Olivier Véran a affirmé devant l’Assemblée nationale que «5% des patients hospitalisés» disposaient de faux pass sanitaires et n’étaient pas vaccinés, sans préciser la source de ce chiffre.
Comme nous l’expliquions dans un article publié début décembre, consacré à la possibilité des services de réanimation de repérer les faux vaccinés, il n’existe guère de moyens pour les médecins d’avoir de certitude en la matière. Quand bien même certaines situations seraient jugées suspectes (par exemple un patient jeune dont le schéma vaccinal a été récemment achevé), seuls les aveux du patient – ou de sa famille – à l’équipe médicale permettent d’établir la vérité.
Ces dernières semaines, plusieurs médecins réanimateurs ont relayé dans les médias des estimations de cette situation, fondées sur des observations à l’échelle de leur hôpital. Cependant, à ce jour, une seule investigation d’envergure nationale sur cette question a été initiée. Le 28 décembre dernier, la Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar) a en effet mené une «enquête flash» auprès de ses membres, en métropole et en outre-mer. C’est sur cette étude que s’est basé Olivier Véran, comme nous l’a expliqué son cabinet.
Patients sous ventilation mécanique
Comme nous le détaillait, dans un précédent article, le président du comité réanimation de la Sfar, Olivier Joannes-Boyau, des réponses sont remontées de 165 services de réanimations et soins continus, soit «environ un tiers de l’ensemble des services de réanimations de France».
Ce questionnaire visait à connaitre, «un jour donné, la pression exercée par les Covid graves dans ces services». L’enquête se focalise exclusivement sur les patients sous ventilation mécanique, «puisque ce sont ceux qui bloquent les lits pendant plusieurs jours, voire semaines, et donc limitent durablement les capacités d’accueil», précise Joannes-Boyau.
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Le jour de l’enquête, les patients Covid sous ventilation mécanique représentaient 896 patients. «Seuls 181 patients présentaient un schéma vaccinal complet comportant au moins deux doses de vaccin à ARN messager (ou un antécédent de Covid et une dose de vaccin ARN), soit 20,2% du total.» Un chiffre qui aurait pu s’élever à 222... Si le statut vaccinal réel de 41 titulaires de faux pass n’avait pas été établi par les équipes de réa. Les faux pass représentaient donc 4,5% de l’ensemble des patients Covid sous ventilation. Ce qu’on peut traduire autrement : 5,7% des patients non-vaccinés intubés en réanimation avaient un faux certificat de vaccination.
Précaution
«C’est loin d’être négligeable, sachant d’une part que ce chiffre ne vaut que pour le jour de l’enquête, et que nous ne tenons compte que des personnes ventilées», explique Olivier Joannes-Boyau. Qui précise que la réalité du statut vaccinal a été obtenue «après échange avec le patient, avant son intubation, ou avec sa famille». Les informations collectées par la Sfar ne permettent toutefois pas d’établir la part des pass simplement usurpés et ceux édités au nom du patient, à l’issue d’une «fausse vaccination» (inscription nominative dans les registres des personnes vaccinées).
L’estimation de 4,5% de faux pass, reprise par Olivier Véran, doit être considérée avec précaution. Premièrement, le nombre de 41 correspondant à des «aveux», il est possible que le pourcentage de faux vaccinés intubés en réanimation à la date de l’enquête soit supérieur à 4,5%.
Par ailleurs, il est forcément un peu hasardeux d’extrapoler les résultats d’un tiers des services de réanimation à l’ensemble des services de réanimation du pays... Et plus encore, comme le fait Olivier Véran, à l’ensemble des hospitalisés pour Covid (au-delà, donc des seuls services de réanimations).