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Syrie : Salwa, la fillette de 3 ans qui riait sous les bombes d’Assad, vit désormais avec sa famille au Canada

En 2020, une vidéo virale montrait une enfant de 3 ans, que son père faisait rire à chaque bruit de bombe. La famille a été à nouveau filmée, début décembre au Canada, dans un cortège célébrant la chute du dictateur syrien.
Image tirée de la vidéo devenue virale en 2020.
publié le 7 janvier 2025 à 8h32

Son rire avait ému le monde entier. En février 2020, la vidéo d’une fillette syrienne éclatant de rire à chaque obus explosant à proximité de sa maison était rapidement devenue virale. Salwa, trois ans, se tenait alors à côté de son père, Abdullah al-Mohammad, dans leur maison de la province d’Idlib, en Syrie, en pleine guerre civile. C’est lui qui avait inventé ce jeu, afin de combattre la peur et le traumatisme des bombardements.

Aujourd’hui, près de cinq ans plus tard, père et fille sont à nouveau mentionnés sur les réseaux sociaux. Plusieurs publications assurent ainsi que «la fillette syrienne Salma, qui figurait il y a plusieurs années dans une vidéo avec son père tentant de la faire rire malgré le bruit des bombes du régime d’Assad, est apparue dans une nouvelle vidéo célébrant avec son père la victoire et la chute du régime d’Assad».

Ces tweets mettent en regard deux vidéos : celle de la petite fille riant avec son père et une autre, où une foule célèbre la chute du dictateur Bachar al-Assad dans la rue, agitant des drapeaux syriens. Un homme ressemblant physiquement à Abdullah al-Mohammad porte sur ses épaules une fille brune, manteau rose et serre-tête dans les cheveux, qui entonne un chant à la gloire de la Syrie libre. La scène se déroule au pied d’un imposant monument : le parlement de Colombie-Britannique, à Victoria, sur l’île de Vancouver, au Canada.

Cette seconde vidéo, récente, est bien issue des nombreux réseaux sociaux personnels d’Abdullah al-Mohammad - où se trouvent également plusieurs photos de sa fille. La vidéo a notamment été publiée le 9 décembre dernier sur sa page Instagram, soit au lendemain de la chute du régime. Le 11 décembre, il partage une photo de lui prise au même endroit. Il pose avec un immense sourire devant l’objectif, tenant cette pancarte entre ses mains : «Nous avons quitté la Syrie le cœur brisé. Nous reviendrons victorieux par l’aéroport de Damas !»

Contacté par CheckNews, Abdullah al-Mohammad confirme que la vidéo montre bien sa fille, la petite Salwa, désormais âgée de huit ans. A la chute du régime, ils se sont rendus dans le centre de Victoria, où ils vivent désormais, afin de célébrer la fuite d’Assad, aux côtés d’autres ressortissants syriens.

Tremblement de terre

En 2020, la vidéo de la fillette riant sous le bruit des bombes ayant fait les gros titres de la presse internationale, le père de Salwa avait rapidement été contacté par les autorités turques afin d’arranger un passage à la frontière. A la fin du mois de février 2020, Abdullah al-Mohammad et sa famille étaient alors secourus et logés à Antakya, en Turquie.

D’après l’Orient le jour, qui a échangé avec eux trois ans plus tard, en février 2023, la fillette et ses parents se trouvaient toujours dans le centre du pays. La ville d’Antakya était alors très durement touchée par le terrible tremblement de terre survenu le 9 février 2023, causant la mort de plus de 50 000 personnes. Salwa et sa famille ont survécu au séisme, mais y ont perdu leur appartement, dont l’immeuble entier s’est effondré.

Auprès de l’Orient le jour, Abdullah al-Mohammad indiquait être dans une situation d’urgence, d’autant plus que sa femme était enceinte de leur deuxième enfant. Il précisait être à la recherche d’un nouveau logement dans une autre ville. Et déclarait : «Avoir traversé près de dix ans de guerre civile en Syrie nous a donné le réflexe de partir dès que les choses tournent mal.»

Et à présent ? La famille de Salwa a donc émigré outre-Atlantique et vit au Canada depuis mars 2023. «J’avais enclenché une procédure via des sponsors pour nous installer au Canada», explique Abdullah al-Mohammad à CheckNews. «Après le tremblement de terre en Turquie, j’ai réactivé les sponsors, les choses se sont accélérées et nous avons pu être accueillis à Victoria.» Celui qui travaille désormais comme apprenti électricien prévoit, à moyen terme, de retourner avec son épouse et ses deux filles dans son pays natal. Mais pas dans l’immédiat. «Saraqeb, la ville d’où l’on vient en Syrie, est complètement détruite. Notre maison a disparu, il n’y a ni école, ni hôpital, ni électricité. D’ici quatre, cinq ans, nous pensons pouvoir revenir en Syrie, mais pas avant.»

En attendant, Salwa suit de près les évènements. «Tous les matins depuis un mois, elle se réveillait en me demandant si on avait gagné» détaille son père. «Cette célébration qu’on voit dans la vidéo, elle lui vient du fond du cœur. Elle conserve des bons souvenirs de la Syrie, des amis qu’on y a laissés. Et aussi des mauvais souvenirs comme les changements de logement en plein hiver, et le bruit des bombes.»