Taxe foncière, nouveau round. Lors de son intervention télévisée ce dimanche, Emmanuel Macron a de nouveau attaqué les élus locaux au sujet de la hausse de la taxe foncière. «Quand vous avez votre taxe foncière qui augmente, ce n’est pas le gouvernement. Ce n’est pas le gouvernement, c’est votre commune qui décide ! Et c’est un scandale quand j’entends des élus qui osent dire que c’est la faute du gouvernement.»
Il souligne toutefois que «beaucoup de maires ont décidé de ne pas augmenter la taxe foncière», ce qui «est dur, parfois, pour leurs finances». Avant d’enfoncer le clou (en citant les deux villes administrées jusqu’à récemment par ses ministres Gérald Darmanin et Christophe Béchu) : «Quand je vois des communes comme Tourcoing, comme Angers, comme d’autres, qui n’ont pas augmenté d’un centime leur taxe foncière, et que Paris l’a augmentée de plus de 60 %, c’est la responsabilité des élus.»
Des propos qui ont fait bondir Anne Vignot, la maire écologiste de Besançon. «Monsieur le président, nous allons rétablir les faits depuis l’exemple de Besançon : ici, nous n’avons pas augmenté la taxe foncière, vous l’avez augmentée de 7,1 % dans toutes les communes. Vous, pas nous.»
Alors monsieur le Président nous allons rétablir les faits depuis l’exemple de #Besançon : ici, nous n’avons pas augmenté la taxe foncière, vous l’avez augmentée de 7,1% dans toutes les communes : Vous, pas nous. https://t.co/Jah7PbxX05
— Anne Vignot (@Anne_Vignot) September 25, 2023
Une hausse bel et bien décidée par l’Etat
L’indignation de l’édile bisontine est largement fondée. En effet, comme l’avait souligné CheckNews le 7 septembre, seules 14 % des communes ont augmenté leur taux de taxe foncière entre 2022 et 2023. La taxe, pourtant, va bel et bien augmenter dans la plupart des communes : sa base de calcul, les «valeurs locatives cadastrales», va prendre 7,1 %. Une mesure qui, si elle bénéficie in fine aux collectivités locales, n’a pas été décidée par elles, mais bien votée au Parlement, où les macronistes sont majoritaires.
De ce fait, les propos du Président s’agissant de l’écart entre Paris et les autres villes sont pour le moins malhonnêtes : l’augmentation décidée par l’Etat est incluse dans les «plus de 60 %» de hausse à Paris… alors qu’elle n’est pas prise en compte pour Tourcoing ou Angers. Si le différentiel reste énorme, la hausse décidée par la ville de Paris est en réalité de 51,8 %, d’après les données du cabinet Finances et stratégies locales (FSL). Cette comparaison, par ailleurs, oublie que le nouveau taux de taxe foncière parisien (20,5 %) reste plus de deux fois inférieur à celui pratiqué à Angers (56,42 %) ou à Tourcoing (50,99 %).
Des dotations largement en baisse
Les propos d’Emmanuel Macron sont également discutables s’agissant des dotations aux collectivités territoriales. Ce qui a occasionné des critiques justifiées, même si parfois imprécises.
Ainsi, contrairement à ce qu’a affirmé Marine Tondelier, secrétaire nationale d’Europe Ecologie-les Verts (EE-LV), la baisse du montant de la dotation générale de fonctionnement (DGF) date bien du mandat de François Hollande (budgets 2014 à 2017) : il avait chuté de 5,1 milliards d’euros pour les communes et les intercommunalités, soit une baisse d’un peu plus de 20 %.
Cependant, là où Emmanuel Macron affirme que «nous n’avons pas baissé les dotations des collectivités territoriales», il a en réalité gelé le montant de la DGF de 2018 à 2022 : selon l’Association des maires de France, elle aurait dû augmenter de 2,6 milliards d’euros sur la période pour suivre l’inflation.
Il en va de même pour la hausse de 320 millions de DGF pour l’année 2023 : comme l’expliquait CheckNews, cette hausse correspondait à une hausse de 1,75 % de la DGF des communes et des intercommunalités… alors que l’inflation devrait avoisiner les 5 % sur l’année. Et la hausse annoncée pour 2024, chiffrée à 220 millions d’euros, ne correspondra qu’à une hausse de 1,2 % de la DGF actuelle (18,64 milliards d’euros) – alors que l’inflation, selon la Banque de France, devrait être de 2,6 %.
Bref, si le montant des dotations des collectivités territoriales n’a pas été formellement baissé par Emmanuel Macron, son évolution est restée inférieure à l’inflation chaque année depuis 2017. Ce qui, quoi qu’en dise le président de la République, correspond bien à une baisse de moyens.