Tiens, se dit-on, voilà une photo de Les gens. «Les gens» est une entité plurielle qui pourtant se conjugue aujourd’hui au singulier. A ce titre le Les gens est devenu une personne qui, comme n’importe qui, aurait des pensées, des envies, des idées et surtout des attentes. Le Les gens a plein de pseudonymes : le Les téléspectateurs, le Les lecteurs, le Les consommateurs. Mais credo fondamental qui justifie son existence, quelles que soient ses identités interchangeables, le Les gens - surtout quand, avatar maximum, il devient Le public -, Le public de Les gens a toujours raison. Et il est bien le seul. Ce qui explique qu’il soit chouchouté et visité par tant d’enquêtes d’opinions, où le but est tout de même de vendre le maximum de marchandises à un maximum de Les gens.
Au risque d’un furieux reproche de misanthropie, on peut se sentir appartenir (à un pays imaginaire, une association d’idées, un club de jokari) sans pour autant se reconnaître ni dans les sentiments ni dans la vie de notre ami Les gens. Un rapide sondage oculaire dans cette photo de Les gens illustre en effet que les gens, c’est tout et n’importe quoi. Autrefois, on disait monsieur et madame Tout-le-monde. Aujourd’hui, on dirait monsieur et madame Les gens. Or, sauf à supposer que ce matin-là, sur un quai de la gare du Nord à Paris, monsieur et madame Les gens débarquent à la capitale accompagnés de leur très nombreuse famille, il est plus raisonnable de supputer que l’on découvre ici une image ordinaire de ba