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Libération

La mort en ce Gaza

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publié le 10 janvier 2009 à 6h51
(mis à jour le 10 janvier 2009 à 6h51)

Il faut croire sur parole la légende de cette photographie : «Une équipe médicale palestinienne transporte une jeune fille tuée à l'hôpital Shifa.» Mais cette image d'actualité ne fait pas que parler de la guerre de cent ans qui oppose Israël et la Palestine. Elle procède aussi du souvenir, parle surtout au souvenir, murmurant d'autres images de «civilisation», autrement immémoriales et universelles.

C’est une pietà, c’est-à-dire comme l’exprime l’étymologie italienne du mot, une pitié. Blanche Ophélie poudrée par la poussière des gravats, rendue albinos par la mort, la jeune décédée de Gaza, mise au centre par la composition du cadre, évoque - entre descente de croix, mise au tombeau ou Blandine évacuée des arènes de son martyre - toute une iconographie chrétienne un rien paradoxale puisqu’on peut supputer que cette jeune fille devait être de confession musulmane.

Les doigts de ses mains sont en extension comme ceux d’une pianiste qui s’apprête à jouer son final ; ses yeux fermés sont comme mi-clos, penchés vers une impossible tentative de déchiffrer la partition de son trépas. Quelque chose de tribal aussi qui tient au sillon rouge qui divise son visage et teinte ses lèvres comme on maquille les morts pour qu’ils soient beaux, séduisants. Mais pour qui ? Le passeur ? Charon, le nocher du Léthé ? Sauf que ce simulacre de scarification rituelle n’est qu’une plaie, balafre de l’éclat qui l’a assassinée.

Cette majestueuse petite princesse des douleurs est soutenue et tra