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Libération

Une ville aspergée

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publié le 9 mai 2009 à 16h30
(mis à jour le 9 mai 2009 à 16h30)

Peut-on être fier d’être allemand ? Après tant d’années passées dans ce pays, la question provoque en moi d’inquiétantes manifestations physiques. Manque d’air, accélération du pouls, rougeurs sur tout le visage, jambes qui flagellent, nausées, tête vide et cotonneuse. En d’autres mots : je suis allergique ! Chacun connaît la litanie d’autoflagellations qui suit forcément la question : notre humour est grossier, notre météo à faire pleurer, notre société n’aime pas les enfants, nos écoles sont pourries, notre économie au bord du gouffre et notre passé nous colle à la peau…

D’ailleurs, comment pourrait-on être fier d’un pays où le hasard vous a fait naître ? Le dénigrement de soi est sans limites. Et même le sursaut de patriotisme décontracté auquel le monde entier a assisté il y a trois ans lors de la Coupe du monde du foot en Allemagne, même la célébration, cette année, de deux anniversaires valorisants - les 60 ans de la République fédérale et les 20 ans de la chute du Mur - n’y pourront rien changer. En Allemagne, le sentiment patriotique semble castré à jamais.

Absolution. C'est du moins ce que je croyais. Jusqu'à ce qu'arrive le mois de mai. Samedi dernier, jour de marché, une grosse voix roule au-dessus de la foule dense. Sûre d'elle, sans l'ombre d'un doute, fanfaronne, même : «Surtout ne prenez pas les étrangères. Les Allemandes sont les meilleures du monde !» Les Italiennes sont trop doucereuses, les Françaises sont fades, les Hollandaises ne