Arthur Rimbaud cesse d’écrire à 20 ans et commence, à partir de 1875, une vie interlope, comme écrite par Joseph Conrad : pérégrinations européennes, séjour à Chypre, puis départ pour l’Afrique. En décembre 1880, embauché comme agent commercial, il arrive à Aden et devient gérant d’un comptoir d’import-export à Harar en Abyssinie où s’échange tout ce qui peut se trafiquer : or, soie, bimbeloterie, armes et qui sait ? esclaves. L’homme alors se dissout, se perd, se comporte, croit-on, de façon bestiale, et synchrone avec cette disparition de lui-même, devient invisible. De fait, de cette période trouble, on ne connaissait que quatre images floues. Rimb en pied, en pyjama blanc, le visage vague. Et c’était satisfaisant, tel un voile d’obscurité qui renforçait la légende.
La découverte d’une photo inédite de cette époque africaine fait littéralement le point. Le cliché (9,6 x 13,6 cm) a été découvert par deux libraires parisiens, Alban Caussé et Jacques Desse, dans une caisse contenant un lot de photos ayant appartenu à Jules Suel, commerçant d’Aden qui finança les ventes d’armes de Rimbaud. On y voit un groupe de personnages (six hommes et une femme) installés sur le perron de l’hôtel de l’Univers que Rimbaud fréquentait, y faisant parfois suivre son courrier.
Les vérifications et recoupements, établis par les deux libraires et le rimbaldien Jean-Jacques Lefrère, ne laissent guère de doute quant au nom de l'homme assis à l'extrême droite. Implantation des cheveux, méplats sous l