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Libération

La folle utopie du bonheur obligatoire

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La Semaine de Frédéric Rouvillois.
par Frédéric Rouvillois
publié le 8 mai 2010 à 0h00

Samedi

Leçon du 1er  mai

Je hais les 1er Mai, comme d’autres les dimanches. Il est vrai que cela revient moins souvent. Cet oxymore annuel qui consiste à fêter le travail en condamnant tout le monde à une inaction forcée m’a toujours paru intolérable, au même titre que ces réjouissances obligatoires à la façon de l’abbaye de Thélème : l’un disait, allons, et tous allaient ; l’un disait, buvons, et tous buvaient ; l’un disait, réjouissons-nous, achetons des brins de muguet à 1,50 euro, fêtons l’avenir radieux, et tous faisaient de même. Le premier des droits de l’homme est celui qui consiste à n’être pas heureux avec tout le monde, ni comme les autres. A l’inverse, le bonheur obligatoire est le critère de l’utopie dans ce qu’elle a de plus objectivement terrifiant : l’enfer serait un monde où chaque jour serait un jour de fête, comme dans la république rêvée par Saint-Just. La leçon de ce 1er Mai, c’est aussi que la mobilisation syndicale n’est massive que lorsque la Fête du travail tombe en pleine semaine. Quand elle a lieu un samedi, bref, lorsqu’elle empiète sur les loisirs, il n’y a plus personne. C’est qu’il y a des priorités, dans la vie. Pas question de sacrifier son week-end à la solidarité ouvrière.

Dimanche

La chasse du chineur

C’est dimanche, jour de chine. A Paris, le bibliophile désargenté (c’est mon cas) a le choix entre les Puces de Vanves et le marché aux livres du parc Georges-Brassens. C’es