Samedi
Sorry, the Père Noël is dead
Paris, ses rues, sa forêt de boutiques. Sous un ruissellement de loupiotes, allumeuses des longues nuits d'hiver à force de clins d'yeux électriques, mon signal d'alerte clignote «attention, Noël approche». 17 heures, je suis en pleine contradiction. La marchandise me harangue, me drague désespérément, comme si sa vie en dépendait, comme si l'emploi en dépendait, comme si l'avenir fondait son espérance sur les quatre chiffres du code de ma carte bancaire. Dans les vitrines, des babioles probablement pleines de formamide et affublées d'obscènes papiers cadeau s'agrippent à mon manteau, les yeux pleins d'espoir, suppliant de leurs couleurs criardes «achetez-moi !». Le sauvetage de l'économie, c'est si je consomme. Arg. Mon pays a besoin de moi. J'en aurais presque l'impression de faire du caritatif en achetant des cadeaux de Noël. C'est vrai, pour les enseignes, c'est une période cruciale : on fait ou on ne fait pas son année. Ça tombe bien parce que pour nous, les gens, Noël est une période cruciale également, de réassurance de l'amour par l'objet selon le théorème mathématique suivant : plus l'objet est cher, plus l'amour est cher. Je suis prisonnière de cette croyance dès lors que tous les autres y croient. La décroissance n'est pas pour demain. Noël si. Je dois décider là tout de suite si je fais un coup d'Etat sous le sapin. Sorry, the Père Noël is dead. Accident de traîneau, on a tout tent