En ces temps où le grand capital exige qu’on le dédommage des dérèglements bancaires qu’il a lui-même excités, obéissant ainsi à son fonctionnement ontologiquement catastrophique, cette image d’une grève fait du bien. A savoir des ouvriers de la cimenterie Lafarge de Saint-Vigor-d’Ymonville (près du Havre) bloquant mardi l’entrée de l’établissement qui les emploie. Ceci par solidarité, après l’annonce qu’une autre cimenterie Lafarge, à Frangey dans l’Yonne, allait fermer (74 salariés menacés).
Or la consommation de ciment en France devrait progresser de 4 à 5% en 2011 par rapport à 2010 et le groupe Lafarge a réalisé en 2010 un chiffre d’affaires de 16,2 milliards d’euros pour un résultat d’exploitation de 2,4 milliards. Comme on dit, pas si bêtement, cherchez l’erreur. On imagine le babil de la direction : rentabilité, délocalisation, restructuration nécessaire. En insistant sur le «nécessaire» pour instiller l’idée que c’est la faute à pas de chance, que la crise est mondiale et pas sympa, et autres fadaises fatalistes au nom du non moins fatal réalisme économique.
Réalisme mon cul, semblent exprimer nos grévistes de Saint-Vigor-d’Ymonville. A voir l’inclinaison accentuée du drapeau rouge de la CGT, on se dit qu’il devait y avoir de fameux coups de vent ce mardi 7 juin sur le site Lafarge. Mais ce qui décoiffe encore plus, c’est l’allure générale de cette manifestation. Grève sur le tas disait-on autrefois pour exprimer que c’est sur son lieu de travail qu’il faut se croiser