Il y a des jours comme ça, pour faire toucher du doigt de ces évidences qui, sous nos climats si volontiers autoproclamés démocratiques, n’en sont pas si naturellement. Pour nous, ce furent ceux des lendemains d’élection d’une Assemblée constituante en Tunisie, dans la victoire du parti Ennahda, libéral en matière économique, social en sa pratique sous Ben Ali, et islamiste en son identité revendiquée.
Front islamique du salut algérien, Frères musulmans égyptiens, Hamas palestinien et tutti quanti… De Maghreb en Machrek, les despotes ont toujours eu besoin d'une opposition terrifiante, sinon terroriste, afin de légitimer, auprès de leurs parrains occidentaux ex-colonisateurs et de leurs peuples même, l'arbitraire de leurs régimes et la fatalité de leur dictature. Quand ils ne suscitent pas ce diable nécessaire, ils l'entretiennent assez pour que, dix ans après le 11 Septembre d'Al-Qaeda, l'islam politique, ça marche toujours : frisson garanti, et absolution garantie aussi pour les tyrans afin que le business se poursuive as usual. Fût-ce avec l'AKP turc, dont la qualification de parti «islamiste modéré» fit tant ricaner l'Union européenne avant que les urnes lui donnent le pouvoir… L'UE aujourd'hui ne ricane plus ; elle ferait même volontiers des affaires avec l'AKP, mais c'est un peu tard.
En dix mois de révolutions arabes, on les aurait presque oubliés, les barbus. De sinistres Cassandre, traumatisés à vie par le syndrome du «choc des civilisations», nous a