Menu
Libération

Faciès à faciès

Article réservé aux abonnés
publié le 5 novembre 2011 à 0h00

Trop moche (moralement) pour être vraie. C'est ce qu'on se dit à la voyure expéditive de cette photographie prise en avril à Gyöngyöspata, village du nord de la Hongrie dont la prononciation (en français) n'est pas le seul problème. Dominée par le parti d'extrême droite Jobbik, la mairie de Gyöngyöspata y a mis en œuvre son programme : nationalisme, xénophobie et antisémitisme. Principales victimes : les Roms, c'est-à-dire, traduit en fascisme local par le maire de Gyöngyöspata, «la criminalité tsigane».

Cette photographie serait donc celle d’un face-à-face inégalitaire. Le chef d’une milice d’extrême droite et un habitant rom sont cachés dans cette image, sauras-tu les reconnaître ? La devinette n’est pas trop compliquée à résoudre. Mais c’est cette facilité qui alerte. Ce qui, en effet, est moins évident à démêler dans cette photo, c’est sa part de caricature cachée, le trop-plein de «trop». Le milicien trop blond, trop rasé, trop en treillis et béret rouge. Le Rom trop brun, trop mal rasé, trop habillé en (vrai? faux ?) tee-shirt Adidas. La disposition des deux hommes emporte elle aussi sa part de doute. Dans ce trois-quarts face-à-face, où le regard de l’un n’accroche pas celui de l’autre, on pourrait soupçonner, outre l’ébauche d’un casting, un rien de mise en scène. Sauf que pas du tout. Si le milicien s’est sciemment construit un physique et une allure de Rambo à nuque rase et nez en patate broyée qui rebutent, l’homme rom touche, au contraire, par sa volonté