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Libération

Cannibalisme conjugal

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publié le 29 août 2014 à 18h07

Dans les contrées riches et pacifiques que nous habitons, aucun fléau n'est plus redoutable que l'amour. Si dans d'autres régions du globe on se bat contre la misère, contre les dictatures et contre les guerres, nos malheurs à nous naissent de la place que nos sociétés ont octroyée à la passion amoureuse. Depuis quelques décennies, celle-ci accoucha d'une institution effroyable qu'on appelle le couple. Si ce dernier était destiné à éteindre les désirs que la passion allume, on n'aurait rien à lui reprocher. Ce qui rend cette institution si regrettable, c'est qu'elle abrite aussi des relations domestiques, économiques, familiales, voire thérapeutiques.

Le couple profite de la passion que deux personnes éprouvent l’une pour l’autre afin que celles-ci cohabitent, mettent au monde des enfants, fassent des choix professionnels, s’écoutent et se soutiennent. Et aussi afin de tisser des liens de parenté et de solidarité économique. En bref, l’on fait dépendre toutes ces questions essentielles à l’équilibre, à la prospérité et au bonheur de chacun, d’un sentiment si peu sérieux. D’autant que le couple vit dans un milieu social dans lequel les institutions intermédiaires comme la famille, les partis politiques, les syndicats, les églises, ces instances qui liaient, obligeaient, faisaient craindre, aimer et espérer ont été dévastées.

De ce fait, les affects que le couple abrite sont plus puissants que ceux qu’entretiennent les adultes entre eux. Ils fonctionnent comme un îlot d