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Libération

Le masculin et le féminin

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publié le 31 octobre 2014 à 17h26

Quand Virginia Woolf essaie de comprendre ce qui pousse tant d'hommes, et si différents, à vouloir écrire et légiférer sur les femmes, elle ne leur trouve qu'un point commun : ils ne sont pas des femmes. Et elle écrit, de son côté, Une chambre à soi. J'ai le bonheur de re-traduire ce joyeux livre, presque cent ans après sa première parution. Bien sûr, quand elle parle de son métier à elle, je traduis par écrivaine. Et par professeure, quand elle évoque telle amie beaucoup moins bien payée que ses collègues masculins. Tout le livre de Woolf est une histoire des femmes et des métiers : ceux qu'elles n'ont pas pu exercer, l'argent qu'elles n'ont pas pu posséder, le pouvoir qu'elles n'ont pas pu exercer. Jusqu'à sa célèbre image : Judith Shakespeare, la sœur très douée de William, massacrée par les conditions de vie faites aux femmes, grossesses non désirées, éducation empêchée, soumission au père ou à l'époux, interdiction de compte en banque, Judith Shakespeare qui se suicide faute de devenir auteure de théâtre et metteuse en scène.

Refuser que le métier s'accorde au féminin, comme 142 députés français le réclament, c'est refuser la libération des femmes, celle qui s'est faite grâce à la contraception et à une conception des droits de l'homme comme droits de l'humain. Quand Julien Aubert, député du Vaucluse, insiste pour appeler «Madame le Président», et non Madame la Présidente, Sandrine Mazetier, vice-présidente de l'Assemblée nationale, il