Je n’ai jamais écrit la moindre ligne à Kyoto. A croire que la ville et sa pulsation m’absorbent trop. Me suffisent. A croire que ces temples déserts, ces jardins suaves, ces montagnes cotonneuses s’accordent si bien à mon rythme intérieur qu’ils n’exigent rien de plus. Parfois, je me demande si une vie de moine bouddhiste ne m’irait pas. Pourvu qu’elle soit bien fournie en saké. Et si, à long terme, je consentirais à ne plus sentir trépigner en moi ce besoin d’écrire qui me ronge et la douleur obscure qui en est la source. Cela me fait penser à mon médecin. Un jour, il m’a avoué m’administrer un traitement suffisant pour me préserver des principaux désagréments liés à la dépression mais s’en garder un peu sous la semelle, histoire de ne pas tuer en moi la bête qui se débat et me pousse à m’asseoir à mon bureau. Drôle de type. Plus un coach qu’autre chose au final. Qui tient moins à me guérir qu’à entretenir une forme de déséquilibre, à le stabiliser.
Quand je suis rentré vivre à Paris, au début de l’été, nous nous sommes retrouvés comme des amis qui s’étaient perdus de vue. Rien n’avait changé. J’étais là pour les mêmes raisons. Il m’a prodigué les mêmes soins. Et quand nous nous sommes séparés, au moment de lui tendre ma carte Vitale, il m’a lancé : pas de ça entre nous. Je suis trop heureux de vous revoir. Evidemment, vu les motifs de ma visite, qu’il soit «heureux» de me voir, m’a laissé songeur. Mais passons.
Si une fois de plus je n’ai pas écrit une ligne à Kyoto, cela t