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Libération

L’asile au prisme des années 30

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par Julie Pagis, chercheure en sociologie politique au CNRS.
publié le 19 décembre 2014 à 17h46

Bernard Cazeneuve a défendu la réforme du droit d'asile, adoptée mardi à l'Assemblée nationale, au nom du renforcement d'un droit «constitutif de notre identité républicaine» et de l'histoire d'une France qui aurait «accueilli tour à tour les patriotes italiens et polonais, les Arméniens et les Juifs persécutés, les résistants antifascistes et les républicains espagnols» (1) . Un retour sur les années 30 n'est pourtant pas inutile pour éclairer, par l'histoire, quelques-unes des mesures réellement proposées.

Dire que «le droit d'asile et la République sont consubstantiels», c'est oublier un peu vite que ce ne fut pas toujours le cas : le livre d'Ivan Jablonka (2), consacré à l'histoire de ses grands-parents, polonais communistes et juifs, le rappelle de manière opportune. Quand Matès et Idesa, doublement persécutés en Pologne (en tant que Juifs et militants communistes), se réfugient en France en 1937, leur première démarche est de demander l'asile politique. Le 24 décembre, Matès se voit remettre une «feuille volante de couleur rose : refus de séjour» et tombe sous la coupe de la circulaire de Marx Dormoy (socialiste et ministre de l'Intérieur) qui enjoint les préfets à une sévérité particulière envers ces «individus sans travail et sans ressources, en quête de situations quelles qu'elles soient». Idesa produit