Menu
Libération

Grexit, Brexit, Frexit & Co

publié le 29 mai 2015 à 18h26

Professeur(e)s Toc et Zoc, vous êtes les spécialistes mondiaux de toute situation. Que nous décryptez-vous cette semaine ?

Pr Zoc : La France peut-elle rester dans l'Europe après les résultats catastrophiques de l'Eurovision ? Ça commence à bien faire. Année après année, le pays est outragé, brisé, martyrisé. Alors pourquoi les Grecs peuvent-ils nous menacer de (ou nous faire miroiter) un Grexit, les Anglais un Brexit et nous ne pas poser sur la table la question du Frexit ?

Pr Toc : Les Français qui sont dans l'Europe jusqu'au cou devraient faire des sacrifices pour les Anglais qui n'y sont que jusqu'aux chevilles ? Non mais.

Pr Zoc : L'Europe, on l'aime ou on la quitte. Si la France se sépare de l'Europe, il lui restera quand même la francophonie. Les Anglais ont les Etats-Unis. Mais les Grecs, chez qui pourraient-ils aller se faire voir ?

Pr Toc : Si le rêve d'une Europe à la carte est inaccessible, ça n'oblige personne à trouver la formule du jour tellement appétissante.

Pr Zoc : N'y aurait-il pas une certaine jalousie à imaginer la perfide Albion se précipiter sur les canots de sauvetage pendant qu'on rame dans la choucroute ? Mais que diable va-t-elle faire hors de cette galère ? Il ne faudrait pas qu'on soit un continent naufragé à la dérive et que, dans cette Europe de la Méduse, on finisse par être contraint de se dévorer entre soi.

Pr Toc : Et si, comme un seul homme, les Français boycottaient le thé, les scones et la panse de brebis farcie, ça ne forcerait-il pas les Anglais à voir les avantages qu'elle a tirés de son intégration européenne ?

Pr Zoc : La possibilité d'un référendum britannique est à même de créer la panique. On redoute que les Anglais respectent le résultat de la consultation populaire, comme s'ils n'avaient rien retenu de l'exemple français à propos de la constitution continentale. Le référendum sur l'indépendance de l'Ecosse, on ne peut pas dire non plus qu'ils se soient précipités pour l'organiser. Les voies de la démocratie sont impénétrables.

Pr Toc : Ces Anglais, seront-ils des nôtres ? Avaleront-ils la couleuvre comme les autres ?

Pr Zoc : Certains proposent d'échanger l'Angleterre contre la Turquie.

Pr Toc : Mais ça ne marche pas comme ça, la diplomatie. Ils ont La City, à Istanbul ?

Pr Zoc : Ils ont l'armée, et dans un coin où les alliés sont utiles.

Pr Toc : Si les Anglais sortent de l'Europe, sera-ce une victoire ou une défaite dans la lutte (de longue haleine) contre la finance internationale ?

Pr Zoc : Le paradoxe est que les Britanniques aiment tant passer leurs vacances chez nous, y acheter des maisons, comme s'ils voulaient avoir nos fromages et l'argent de nos fromages. Mais peut-être souhaitent-ils voir l'Europe comme une destination exotique.

Pr Zoc : Quant aux Allemands, on comprend leur panique à se retrouver en quasi-tête à tête, comme un vieux couple, avec cette France qui aura mécaniquement pris du poids. On dirait qu'on ne les excite plus.