Si j’ai bien compris, il y a deux sortes de dirigeants : ceux qui veulent arriver là pour se hausser du col et dîner avec la reine d’Angleterre ; et ceux qui sont fiers d’être chefs d’Etat pour péter à table ainsi que vient à peu près de faire Jair Bolsonaro. Dans ces conflits de cour d’école, il y a un côté «Mon pays est plus grand que ton pays, la la lère» où Donald Trump est tellement le plus fort qu’il est parfois obligé de se conduire correctement pour en profiter, car il serait bien avancé si un sommet ne consistait qu’à donner des coups de pied dans le tibia des autres ou qu’il lui fallait attraper Angela Merkel par la chatte pour en finir avec les exportations de voitures allemandes aux Etats-Unis. Mais le président du Brésil n’a pas de ces pudeurs soudaines et compte sans doute marquer son territoire en tâchant de pisser le plus loin possible. Emmanuel Macron n’a d’ailleurs pas non plus perdu de vue l’électorat français tout au long de son G7. Mais, entre Jair Bolsonaro, Donald Trump et Boris Johnson (et Angela Merkel, question renouvellement du personnel dirigeant), les chefs d’Etat ou de gouvernement étrangers lui mâchent le boulot pour contrer le «Tout sauf Macron». Il peut dire aux Français «La la lère, vous n’avez personne d’autre» en passant son pouce sous son menton et en tirant la langue. C’est agaçant mais pas entièrement inefficace.
Donald Trump et Jair Bolsonaro ne paraissent pas du genre à se faire des cheveux pour quoi que ce soit d’autre que leur réélection ou leurs intérêts personnels (et familiaux) mais, entre la fameuse perruque de l’un et le rendez-vous décommandé avec notre Jean-Yves Le Drian des Affaires étrangères pour cause de coiffeur de l’autre, il faut pourtant croire qu’ils se la jouent un peu Samson. Ça pourrait créer des conflits entre eux, car si le président des Etats-Unis est plus puissant, celui du Brésil est plus jeune, et qui sait ce que préfèrent les femmes qu’ils visent ? Si la misogynie et l’homophobie du président brésilien provoquent des réactions dans le monde entier, il faut croire que le communautarisme a ses limites car son racisme envers les Indiens d’Amazonie suscite moins d’indignations en Europe, où ces Indiens ne sont pas légion et où leurs fameux arbres bienfaiteurs sont désormais ce qu’on connaît le mieux de l’Amazonie. Mais paraît-il qu’il y a aussi des êtres humains, là-bas, qu’on pourrait, pourquoi pas ? soutenir et protéger autant que des végétaux.
C’est Silvio Berlusconi qui doit l’avoir mauvaise. Dur de ne plus en être maintenant que tant de chefs d’Etat ont enfin l’air d’être de si bons bougres en compagnie de qui on aurait pu faire bunga-bunga sans cris d’orfraie. Avec lui, si les Danois n’auraient jamais vendu le Groenland à Donald Trump, c’est parce que l’Italien leur aurait dit : «Je ne sais pas combien il vous propose, mais je vous offre le double.» Peut-être au demeurant est-ce ce que leur a dit Jair Bolsonaro. Et au G7 de l’an prochain, quand ce sera Donald Trump qui invitera chez lui, pour un sommet c’en sera sûrement un, de sommet. On pourra s’y donner pour de bon, danser la rumba en maillot autour de la piscine, hamburgers, ketchup et mayonnaise à volonté. Si j’ai bien compris, sûrement que l’ami Jair sera de la partie, par exemple comme invité d’honneur (il le mériterait bien) avec qui on pourra vanner à donf, lits des filles en portefeuille et tout ça, et se dégourdir le poireau dans les grandes largeurs.